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Les clauses de l’Armistice du 11 novembre 1918

L'armistice du 11 novembre 1918 cherche à réduire l'Allemagne pour éviter de nouveaux conflits militaires et instaurer la paix en Europe.
Retour à Berlin des troupes allemandes après la signature de l'armistice - Photographe inconnu (Bundesarchiv, Bild 183-R34275) | Creative Commons BY-SA 3.0
Retour à Berlin des troupes allemandes après la signature de l’armistice – Photographe inconnu (Bundesarchiv, Bild 183-R34275) | Creative Commons BY-SA 3.0

La défaite militaire imminente de l’Allemagne pousse des plénipotentiaires à demander un armistice à la France. C’est chose faite le 11 novembre 1918 à 11 heures du matin. La Première Guerre mondiale prend fin. Les clauses de l’Armistice du 11 novembre sont des éléments importants pour comprendre le sentiment de Diktat que subissent les Allemands.

Les clauses sont contraignantes et très sévères envers le pays considéré comme le seul responsable moral de la Grande Guerre. Sans les énumérer toutes, une version numérisée est accessible sur le site du Service historique de la Défense. Néanmoins, nous souhaitons vous en faire découvrir les plus importantes.

L’Allemagne amputée géographiquement

La convention d’armistice règle de nombreux détails, qu’ils soient militaires ou civils. En ce sens, l’armistice règle le problème de la territorialité de l’Allemagne. Ainsi, tous les gains territoriaux acquis par la guerre sont rendus et perdus. Des millions de morts pour rien, en sachant que les Alliés et les États-Unis occupent désormais des territoires allemands.

II. Évacuation immédiate des pays envahis : Belgique, France, Luxembourg — ainsi que de l’Alsace-Lorraine — réglée de manière à être réalisée dans un délai de 15 jours, à dater de la signature de l’armistice.

Convention d’armistice 11 novembre 1918

La France récupère l’Alsace-Lorraine perdue lors de la guerre franco-prussienne de 1870. La France retrouve son intégrité territoriale.

V. Évacuation des pays de la rive gauche du Rhin par les armées allemandes.

Les pays de la rive gauche du Rhin seront administrés par les autorités locales, sous le contrôle des troupes d’occupation des Alliés et des États-Unis.

Les troupes des Alliés et des États-Unis assureront l’occupation de ces pays par des garnisons tenant les principaux points de passage du Rhin (Mayence, Coblentz, Cologne) avec, en ces points, des têtes de pont de 30 kilomètres de rayon, sur la rive droite, et des garnisons tenant également les points stratégiques de la région.

Une zone neutre sera réservée, sur la rive droite du Rhin, entre le fleuve et une ligne tracée parallèlement aux têtes de pont et au fleuve, et à 10 kilomètres de distance, depuis la frontière de Hollande jusqu’à la frontière de Suisse.

L’évacuation par l’ennemi des pays du Rhin (rive gauche et rive droite) sera réglée de façon à être réalisée dans un délai de seize nouveaux jours, soit trente et un jours après la signature de l’armistice.

Tous les mouvements d’évacuation ou d’occupation seront réglés par la note annexe no 1, arrêtée au moment de la signature de l’armistice.

Convention d’armistice 11 novembre 1918

L’Allemagne est considérée comme l’agresseur, le responsable de la Première Guerre mondiale. La France souhaite par dessus tout réduire la puissance démographique et industrielle du pays. S’accaparer les territoires industriels de la Rhénanie est un bon moyen de le faire.

XII. Toutes les troupes allemandes qui se trouvent actuellement dans les territoires qui faisaient partie avant la guerre de l’Autriche-Hongrie, de la Roumanie, de la Turquie, doivent rentrer immédiatement dans les frontières de l’Allemagne telles qu’elles étaient au 1er août 1914.

Toutes les troupes allemandes qui se trouvent actuellement dans les territoires qui faisaient partie avant la guerre de la Russie devront également rentrer dans les frontières de l’Allemagne définies comme ci-dessus, dès que les Alliés jugeront le moment venu, compte tenu de la situation intérieure de ces territoires.

Convention d’armistice 11 novembre 1918

À l’Est comme à l’Ouest, rien de nouveau, le territoire est rendu, les armées allemandes sont ramenées aux frontières de l’Allemagne à l’été 1914. Cette insupportable situation provoque colère et incompréhension en Allemagne. La population n’a subi aucune invasion ou occupation de son territoire. Il y a une incompréhension de ce traitement en perdant de l’Allemagne. La souffrance endurée par la population pendant toute la guerre, que ce soit les privations, la mort de fils et de frères, rend cette incompréhension violente et haineuse, surtout vis-à-vis de la France.

XVII. Évacuation de toutes les forces allemandes opérant dans l’Afrique Orientale dans un délai réglé par les Alliés.

Convention d’armistice 11 novembre 1918

Les quelques colonies allemandes d’Afrique sont tout simplement dépossédées de leur protection militaire, les laissant libres à l’appétit français ou britannique.

La puissance industrielle du pays livrée

La France, dans un état de peur viscérale de l’Allemagne, cherche à réduire d’éventuelles velléités, notamment en s’accaparant ses capacités industrielles. C’est aussi une manière de récupérer ce que l’Allemagne a détruit sur le territoire français. Le Nord de la France, alors très industrialisé, a été détruit et occupé.

Exemple de destruction d’outillage industriel à la fosse no 1 - 1 bis - 1 ter de la Compagnie des mines de Liévin - Auteur inconnu | Domaine public
Exemple de destruction d’outillage industriel à la fosse no 1 – 1 bis – 1 ter de la Compagnie des mines de Liévin – Auteur inconnu | Domaine public

VI. […] Il ne sera pris aucune mesure générale ou d’ordre officiel ayant pour conséquence une dépréciation des établissements industriels ou une réduction de leur personnel.

VII. Les voies et moyens de communication de toute nature, voies ferrées, voies navigables, routes, ponts, télégraphes, téléphones, ne devront être l’objet d’aucune détérioration.

Tout le personnel civil et militaire, actuellement utilisé, y sera maintenu.

Il sera livré aux puissances associées :

5.000 machines montées et 150.000 wagons en bon état de roulement et pourvus de tous rechanges et agrès nécessaires, dans les délais dont le détail est fixé à l’annexe no 2 et dont le total ne devra pas dépasser 31 jours.

Il sera également livré 5.000 camions automobiles en bon état, dans un délai de 36 jours.

Les chemins de fer d’Alsace-Lorraine, dans un délai de 31 jours, seront livrés, dotés de tout le personnel et matériel affectés à ce réseau.

En outre, le matériel nécessaire à l’exploitation dans les pays de la rive gauche du Rhin sera laissé sur place.

Tous les approvisionnements en charbon et matière d’entretien, en matériel de voies, de signalisation et d’atelier, seront laissés sur place. Ces approvisionnements seront entretenus par l’Allemagne, en ce qui concerne l’exploitation des voies de communication des pays de la rive gauche du Rhin.

Tous les chalands enlevés aux Alliés leur seront rendus, la note annexe no 2 règle le détail de ces mesures.

Convention d’armistice 11 novembre 1918
Trains contenant du matériel versé au titre des réparations après le traité de Versailles - Photographe inconnu Bundesarchiv, Bild 183-R02190 | Creative Commons BY-SA 3.0
Trains contenant du matériel versé au titre des réparations après le traité de Versailles – Photographe inconnu Bundesarchiv, Bild 183-R02190 | Creative Commons BY-SA 3.0

L’objectif est multiple : permettre à la France de se renforcer grâce à sa victoire et sa dominance sur le vaincu, tout en récupérant des éléments de production pour reconstruire les milliers de kilomètres carrés détruits pendant la guerre. Inévitablement, cette mainmise de la France et des Alliés sur la composante industrielle allemande provoque colère et ressentiment outre-Rhin.

Une armée réduite à néant

La puissance militaire allemande est réduite à néant, cependant, c’est bien le Traité de Versailles de 1919 qui signe la décapitation pure et dure des forces militaires allemandes. Dans un premier temps, l’objectif est de s’accaparer tout le matériel allemand qui se trouve hors des frontières allemandes.

IV. Abandon par les armées allemandes du matériel de guerre en bon état :

5.000 canons (dont 2.500 lourds et 2.500 de campagne),
2.500 mitrailleuses,
3.000 minenwerfers,
1.700 avions de chasse et de bombardement ; en premier lieu tous les D 7 et tous les avions de bombardement de nuit, à livrer sur place aux troupes des Alliés et des États-Unis, dans les conditions de détail fixées dans la note annexe no 1, arrêtée au moment de la signature de l’armistice.

Convention d’armistice 11 novembre 1918
Photo d'archive allemande de 1920 illustrant le démontage d'un canon lourd, en application de la disposition du traité imposant la destruction des armes lourdes - Photographe inconnu Bundesarchiv, Bild 183-R02190 | Creative Commons BY-SA 3.0
Photo d’archive allemande de 1920 illustrant le démontage d’un canon lourd, en application de la disposition du traité imposant la destruction des armes lourdes – Photographe inconnu Bundesarchiv, Bild 183-R02190 | Creative Commons BY-SA 3.0

XXIII. Les navires de guerre de surface allemands qui serons désignés par les Alliés et les États-Unis seront immédiatement désarmés, puis internés dans des ports neutres, ou à leur défaut dans les ports alliés désignés par les Alliés et les États-Unis.

Ils y demeureront sous la surveillance des Alliés et des États-Unis, des détachements de garde étant seuls laissés à bord.

La désignation des Alliés portera sur :

6 croiseurs de bataille,
10 cuirassés d’escadre,
8 croiseurs légers (dont 2 mouilleurs de mines)
50 destroyers des types les plus récents.

Tous les autres navires de guerre de surface (y compris ceux de la rivière) devront être réunis et complètement désarmés dans les bases navales allemandes désignées par les Alliés et les États-Unis, et y être placés sous la surveillance des Alliés et des États-Unis.

L’armement militaire de tous les navires de la flotte auxiliaire sera débarqué.

Tous les vaisseaux désignés pour être internés seront prêts à quitter les ports allemands 7 jours après la signature de l’armistice.

On donnera par T.S.F. les directions pour le voyage.

Convention d’armistice 11 novembre 1918

En ce qui concerne la marine et l’aviation, l’ensemble du matériel allemand doit être livré aux Alliés. Ces éléments doivent rendre impossible la reprise de la guerre. Rappelons en effet que l’armistice n’est valable que pendant les 36 jours qui suivent la signature. Le conflit, même si c’est une perspective complexe, peut reprendre.

XXXIV. La durée de l’armistice est fixe à 36 jours, avec faculté de prolongation.

Convention d’armistice 11 novembre 1918

Un armistice à charge, contre l’agresseur

Pour la première fois, le vaincu ne peut pas négocier les termes de l’armistice. La France et ses Alliés imposent un armistice injuste. Cette situation est prolongée avec le Traité de Versailles, qui est véritablement un traité punitif pour l’Allemagne.

En effet, il est considéré que l’Allemagne et ses alliés sont les seuls responsables de la guerre, ainsi ils doivent répondre de leurs actes et surtout prendre en charge l’entière responsabilité des dommages et des destructions.

[…] l’Allemagne et ses alliés […] responsables pour les avoir causés, de toutes les pertes et de tous les dommages subis par les Gouvernements alliés et associés et leurs nationaux en conséquence de la guerre, qui leur a été imposée par l’agression de l’Allemagne et de ses alliés.

Article 231 du Traité de Versailles, tiré de l’ouvrage : Les traités de paix 1918 – 1923, la paix les uns contre les autres, Sorbonne Université Presses, 2023

Quelques liens et sources utiles

Isabelle Davison et Stanislas Jeannesson, Les traités de paix 1918 – 1923, la paix les uns contre les autres, Sorbonne Université Presses, 2023

Convention d’armistice 11 novembre 1918

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