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Le jeu des alliances de la Première Guerre mondiale

La Première Guerre mondiale est une succession d'alliances qui pousse l'Europe à la guerre, mais n'est pas plutôt la peur ?
Départ de l'hôtel de ville, cinq minutes avant l'assassinat, scène immortalisée par le photographe de la cour autrichienne Carl Pietzner | Domaine public
Départ de l’hôtel de ville, cinq minutes avant l’assassinat, scène immortalisée par le photographe de la cour autrichienne Carl Pietzner | Domaine public

La Première Guerre mondiale est une succession d’alliances qui pousse l’Europe à la guerre. En tout cas, c’est cette histoire que nous connaissons. Cependant, le jeu des alliances est un simple mirage. La raison est plus simple : la peur.

La Grande Guerre embrase l’Europe, une Europe trop étroite pour tout l’impérialisme qui y couve. Le jeu des alliances qui se déclenche après l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand à Sarajevo le 28 juin 1914, n’est que la résultante d’une peur viscérale des uns et des autres.

L’été 1914, vers une guerre totale

Le conflit s’enclenche par peur des autres, ainsi le jeu des alliances s’active, les belligérants souhaitant protéger leurs alliés en cas de défaite potentielle, par peur de se retrouver seuls contre leur ennemi.

Ainsi, le 28 juillet, l’Autriche-Hongrie déclare la guerre à la Serbie, l’Allemagne suit en déclarant la guerre à la Russie et à la France, le 1er août pour l’un et le 3 août pour l’autre. Le Royaume-Uni, ayant peur que la Belgique neutre soit envahie, déclare la guerre à l’Allemagne le 4 août. Le 6 août, l’Autriche-Hongrie déclare la guerre à la Russie en soutien à l’Allemagne. Le 11 août, la France déclare la guerre à l’Autriche-Hongrie, suivie par le Royaume-Uni le 13 août. Le Japon déclare la guerre à l’Allemagne le 23 août. Enfin, le 3 novembre, la France et le Royaume-Uni déclarent la guerre à l’Empire ottoman, qui entre dans le conflit dans le camp de la Triplice.

L’Italie est le seul pays à préférer la raison plutôt que la guerre. Malgré sa place dans la Triplice, l’Italie préfère ne pas envenimer la situation et reste donc neutre.

28 juilletAutriche-Hongrie à la Serbie
1er aoûtAllemagne à la Russie
3 aoûtAllemagne à la France
4 aoûtRoyaume-Uni à l’Allemagne
6 aoûtAutriche-Hongrie à la Russie
11 aoûtFrance à l’Autriche-Hongrie
13 aoûtRoyaume-Uni à l’Autriche-Hongrie
23 aoûtJapon à l’Allemagne
3 novembreFrance et Royaume-Uni à l’Empire ottoman

Cette vision purement diplomatique n’est pas complètement erronée ; chacun des belligérants pense que la guerre sera courte, comme la majorité des guerres de l’époque, d’où la croyance des autorités en une fin du conflit avant la fin de l’année.

Une guerre provoquée par la peur

Comme l’évoque si bien l’ouvrage dirigé par Isabelle Davison et Stanislas Jeannesson, Les traités de paix 1918 – 1923, la paix les uns contre les autres « l’histoire est un cimetière de traités non respectés ». Il est alors étonnant de voir en cet été 1914 autant d’alliances respectées.

L’Italie est un exemple, elle n’a pas souhaité faire respecter ses engagements envers l’Autriche-Hongrie et l’Allemagne. Ainsi, comment expliquer le choix des autres belligérants ?

Pour le cas de l’Autriche-Hongrie, la Serbie est un territoire qui, par son existence, inquiète l’Empire austro-hongrois. Il est nécessaire de la subjuguer. La Russie prend cette crise comme un recul de ses intérêts en Europe de l’Est. Il est nécessaire pour le pouvoir du Tsar de s’affirmer à la fois à l’internationale, mais aussi au sein de son empire où son pouvoir s’affaiblit. Une guerre entre la Russie et l’Empire austro-hongrois est imaginée comme une victoire écrasante des armées du Tsar. L’Allemagne ne peut pas laisser un tel espace dominé par la Russie se créer.

Ces rivalités dans l’Est de l’Europe provoquent l’angoisse des Français. En effet, de ce côté de l’Europe, une coalition austro-allemande provoquerait automatiquement la défaite de l’allié russe, laissant la voie ouverte à cette coalition pour marcher vers la France. Pour les Britanniques, qui ne sont liés par aucun traité, c’est la violation inévitable de la neutralité belge qui inquiète. Le port d’Anvers deviendrait le pont entre l’Europe continentale et l’Île britannique. C’est un risque que le Royaume-Uni ne veut pas prendre.

Cette peur de l’autre est donc l’une des raisons de l’escalade du conflit en Europe à l’été 1914.

Quelques liens et sources utiles

« Que commémore-t-on le 11 novembre ? », Vie publique, 2023

« 11 novembre 1918 : la signature de l’Armistice à Rethondes », Europe 1, 2016

Isabelle Davison et Stanislas Jeannesson, Les traités de paix 1918 – 1923, la paix les uns contre les autres, Sorbonne Université Presses, 2023

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