L'ouvrage coup de cœur d'avril : Petit dictionnaire des Sales Boulots par Nicolas Méra

L’intervention des forces de l’OTAN au Kosovo

1999, le Kosovo est en guerre avec la Serbie depuis 1998. Quel a été le rôle de l'OTAN dans ce conflit meurtrier incompris ?
Récupération des dépouilles des Serbes tués en 1998. Projet « Racines de l'âme » - Darko Dozet | Creative Commons BY-SA 3.0
Récupération des dépouilles des Serbes tués en 1998. Projet « Racines de l’âme » – Darko Dozet | Creative Commons BY-SA 3.0

Le Kosovo est un pays d’Europe du Sud, situé dans les Balkans. Il appartenait auparavant à l’ex-Yougoslavie et n’est reconnu comme état indépendant que par 87 pays membres de l’ONU. À partir de 1998, le pays, cible des nationalistes et du gouvernement serbe, bascule dans un conflit qui bouleverse le paysage humanitaire.

Le caractère humanitaire de la guerre du Kosovo se traduit par l’intervention de forces humanitaires mélangées à une intervention militaire dont il semble difficile de percevoir le réel objectif.

Le Kosovo, une nation bousculée par l’Histoire

En 1878, la Serbie quitte l’Empire Ottoman et les Croates se détachent de l’Empire Austro-Hongrois. En 1918, les Serbes, les Croates et les Slovènes se réunissent au sein d’une monarchie dominée par les Serbes qui devient le “pays des Slaves du sud”, en d’autres termes, la Yougoslavie en 1929.

Après l’occupation nazie pendant la Seconde Guerre mondiale, le maréchal Tito, leader de la résistance victorieuse croate, créer la fédération de Yougoslavie. Cette dernière est composée de six républiques : la Serbie, la Slovénie, le Monténégro, la Macédoine et la Bosnie Herzégovine.

Ainsi, le territoire kosovar se trouvant à l’intérieur de la grande Albanie sous tutelle de l’Italie fasciste, est intégré dans la Yougoslavie comme une province autonome de la République socialiste de Serbie. Cependant, le pays est majoritairement composé d’Albanais.

Carte de l'ex-Yougoslavie établie par la CIA en 1993 - CIA | Domaine public
Carte de l’ex-Yougoslavie établie par la CIA en 1993 – CIA | Domaine public

1989, la chute du mur de Berlin

La chute du mur de Berlin marque le commencement d’une série de revendications d’indépendance des pays du bloc communiste. Slodoban Milošević supprime l’autonomie constitutionnelle de la province du Kosovo la même année et réduit l’indépendance politique et culturelle des kosovars. Il veut une Yougoslavie unie.

Le pays éclate suite aux indépendances de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine. La répression de Milošević se fait grâce à l’armée mais cela ne dissuade pas la Slovénie et la Macédoine de suivre le même exemple que leurs voisins.

À environ 1,5km au nord de la frontière entre le Kosovo et la Macédoine (1999) - Filius humanitas (pseudo Wikipédia) | Creative Commons BY-SA 3.0
À environ 1,5km au nord de la frontière entre le Kosovo et la Macédoine (1999) – Filius humanitas (pseudo Wikipédia) | Creative Commons BY-SA 3.0

L’affrontement Serbe-Kossovare

Le Kosovo se retrouve au milieu de ces guerres pour l’indépendance. La désignation du Kosovo comme province autonome déclenche un certain mécontentement qui résulte sur des manifestations en masse durement réprimées. En 1997, l’UCK se crée et devient un mouvement séparatiste armé.

Les Serbes attaquent l’UCK dans la région de Drencia. La guerre du Kosovo commence après le massacre de Prekaz qui fait 80 morts. L’UCK se lance dans une rébellion contre la Serbie.

Ce que les Serbes ont fait au Kosovo est de l’ordre du génocide. Ce n’est pas juste une expression, c’est un fait.

Madeleine Albright, Secrétaire d’État des États-Unis (1997-2001)

En 1997, Milošević intervient dans la région de Drencia ce qui provoque des protestations dans la communauté internationale étant donné que la Serbie refuse de faire intervenir des médiateurs étrangers. La Serbie reste fermée sur elle-même. Les forces internationales se concertent et adoptent des sanctions économiques contre la Serbie, qui se retire.

Personne n’a le droit de battre le peuple yougoslave. Le Kosovo était, est et restera toujours en Serbie.

Slobodan Milošević, Président de la Yougoslavie (1997-2000)

L’élément déclencheur de l’intervention de l’OTAN dans ce conflit est la conférence de Rambouillet de 1999. Lors de cette conférence, le Kosovo refuse l’autonomie partielle proposée par les Serbes, opposés à l’intervention des forces otaniennes. Le 24 mars 1999, des frappes militaires aériennes sont conduites par l’OTAN contre les forces serbes. Les Serbes répondent avec une répression brutale et provoquent l’exode massif des Albanais. Pendant 78 jours les frappes pleuvent et s’arrêtent avec la signature d’un accord politique entre l’OTAN, la Yougoslavie et la Russie le 10 juin 1999. Les troupes serbes se retirent du Kosovo et laissent place à la Force de paix menée par l’OTAN.

Les campagnes de bombardements de l’OTAN, sont restées fortement controversées, car elles n’ont pas obtenu l’approbation du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Par ailleurs, elles n’ont causé la mort de pas moins de 488 morts au sein de la population, y compris une ombre substantiel de réfugiés kosovars.

Une intervention controversée

L’intervention de l’OTAN est illégale aux yeux du droit international mais est-elle légitime ? Cette opération s’établit comme étant une source de controverse majeure : le Conseil de sécurité des Nations Unies n’a pas donné son autorisation pour le lancement de cette opération. Les critiques et la controverse entourant cette intervention armée de l’Otan sont basés sur le fait que des incidents ayant impliqué la mort de réfugiés du Kosovo mais également celle de civils yougoslaves.

Il y avait un génocide en cours, et nous avons la responsabilité de l’arrêter.

Wesley Clark, commandant suprême des forces alliées de l’OTAN en Europe (1997-2000) :

L’organisation se défend en proclamant qu’il n’y a jamais eu de victimes collatérales. Or, les ONG ayant enquêté sur le terrain montrent bien que les bombardements otaniens ont bien fait des victimes civiles. De plus, la non-autorisation du Conseil de sécurité pour cette intervention fait socle d’une remise en cause du droit international régi par la Charte des Nations Unies.

Les Membres de l’Organisation s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies.

Selon l’article 2 paragraphe 4 de la Charte des Nations Unies

Aucune disposition de la présente charte n’autorise les Nations unies à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d’un État.

Selon l’article 2 paragraphe 7 de la Charte des Nations Unies

Autrement dit, les membres de l’ONU se doivent de respecter l’intégrité territoriale des États ainsi que l’indépendance politique de ces derniers. Les principes de l’ONU, à savoir, le maintien de la paix et la protection des droits de l’Homme font fi de barrières infranchissables au recours à la force.

Dans la logique de maintien de la souveraineté territoriale, l’OTAN s’est assise sur l’article 2 et 4 de la Charte en pénétrant dans l’espace aérien yougoslave. Au niveau du droit international, cette intervention armée est clairement illégale.

Le Kosovo était encore membre de la République fédérale de Yougoslavie, qui ne faisait pas partie de l’ONU. Le débat réside dans le fait, qu’une opération sur un territoire souverain a été initiée, certes à l’aval de l’ONU mais on peut se demander si le principe de souveraineté territoriale promulgué dans la Charte des Nations unies n’est pas bafoué.

Bombardement de l'OTAN contre la RF de Yougoslavie en 1999 - Darko Dozet | Creative Commons BY-SA 3.0
Bombardement de l’OTAN contre la RF de Yougoslavie en 1999 – Darko Dozet | Creative Commons BY-SA 3.0

Le bilan humain est estimé à 13 500 personnes tuées ou disparus. Les forces yougoslaves et serbes ont provoqué le déplacement de 1,2 à 1,4 millions d’Albanais du Kosovo et d’environ 200 000 Serbes, Roms et autres non-albanais.

Quelques liens et sources utiles

Diana Élise Skrapari, La Guerre du Kosovo, Edilivre, 2016

Bernard Adam, LA GUERRE DU KOSOVO. : Eclairages et commentaires, Editions Complexe, 1999

Pierre Péan, Kosovo, Fayard, 2013

Tanja Grahovac, Serbie-OTAN-Russie après la déclaration d’indépendance du Kosovo, Editions Notre Savoir, 2022

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Une réponse

  1. Je suis tenté de comparer à l’opération de l’OTAN au Kossovo en 1999 à l’opération occidentale qui se prépare afin de libérer l’Ukraine de l’occupation russe ; je crois qu’on n’avait utilisé que des avions de chasse sans subir de pertes humaines.

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