Cette jeune normande, Charlotte Corday, n’aura pas vécu plus de 24 ans, et pourtant elle a marqué l’histoire par son geste audacieux et tragique.
À l’époque de la Révolution, elle a tué Marat, député montagnard à la Convention et pour ça Charlotte Corday a fini sur l’échafaud.
L’enfance et l’éducation de Charlotte Corday
Charlotte est née le 27 juillet 1768 à 8 km de Vimoutiers en Normandie dans le pays d’Auge et à 3 km du village de Camembert. Elle est de famille noble, mais sans fortune.
L’enfance
La famille qui a cinq enfants vit dans une petite maison, la ferme du Ronceray des Ligneries, près de Vimoutiers dans l’Orne. Elle y passe sa petite enfance et en 1776, la famille déménage dans la grande ville la plus proche, Caen dans le Calvados.
La fillette n’a pas encore 14 ans lorsque sa mère meurt le 9 avril 1782.
L’éducation à Caen
Devenu veuf, son père se voit alors contraint de placer ses enfants, c’est ainsi que Charlotte et sa sœur cadette deviennent pensionnaires à l’Abbaye aux Dames. Cette abbaye royale accueille les jeunes filles pauvres issues de la noblesse. Elles y reçoivent une éducation sérieuse et de qualité.
Le 2 novembre 1789, au cours de l’Assemblée Constituante, le décret est pris de nationaliser les biens du clergé et de supprimer les ordres religieux. C’est ainsi que prend fin son apprentissage dans cet établissement.
Le retour à la campagne puis de nouveau à Caen
Son père ayant acheté une nouvelle maison, « la ferme des Bois » au Mesnil-Imbert, elle l’y rejoint en 1791, mais cette même année, elle repart vivre à Caen chez une parente âgée, au 148 rue Saint-Jean. C’est là que sa vie va prendre une nouvelle tournure.
Les lectures et les idées politiques de Charlotte Corday
Ce qui ressort, c’est que Charlotte se passionne pour l’histoire, la littérature et la philosophie des Lumières. Elle admire Rousseau, Voltaire et Montesquieu, ainsi que les auteurs antiques comme Plutarque et Tacit. Elle lit aussi Pierre Corneille dont elle est l’arrière-petite-fille. De ses nombreuses lectures, elle acquiert des convictions républicaines.
C’est avec enthousiasme qu’elle assiste aux débuts de la Révolution française, qui promet la liberté, l’égalité et la fraternité. Elle applaudit à la prise de la Bastille, à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ainsi qu’à l’abolition des privilèges.
Elle a l’espoir que le roi Louis XVI, avec l’Assemblée nationale, trouveront le moyen de réformer la France. Mais elle est déçue. La radicalisation du mouvement révolutionnaire ne montre que guerre civile, montée de la Terreur et régicide.
C’est ainsi qu’elle choisit le camp des Girondins, parti modéré qui s’oppose aux extrémistes Montagnards, camp mené par Robespierre et Marat. Elle les voit comme des tyrans, qui trahissent les idéaux de la Révolution et oppriment le peuple.
Charlotte Corday s’est forgée sa propre conscience politique. C’est une femme intelligente et de caractère.
Jean-Paul Marat, député jacobin
Marat est suisse, il est né le 24 mai 1743. Il est médecin, philosophe, homme politique et journaliste influent. Il publie dans son propre journal, L’Ami du peuple. D’une plume acérée, il dénonce des intrigues, des trahisons, des complots et surtout il appelle le peuple à se soulever, à prendre les armes et à faire justice lui-même. C’est un député populaire qui se fait de nombreux ennemis parmi les puissants.
Il a voté pour la mort de Louis XVI sans appel ni sursis.
L’assassinat de Marat
Charlotte ne l’apprécie pas, elle le prend pour un fanatique, un sanguinaire et un dictateur. Elle part de Caen le 9 juillet 1793 pour se rendre au domicile de celui-ci à Paris, avec la ferme intention de le tuer. Elle a du mal à se faire introduire chez lui, mais elle agit avec ruse.
Lorsqu’elle le rencontre enfin, il est dans son bain, il y travaille et reçoit en même temps ses visiteurs. Souffrant d’une maladie de peau, le montagnard se sent mieux quand il est dans l’eau qui soulage ses démangeaisons. Lors de la discussion qu’elle entame avec lui, elle sort son couteau et le plante en pleine poitrine ; nous sommes le 13 juillet 1793, Jean-Paul Marat vient de mourir.
Son décès provoque une émotion parmi le peuple qui le considère comme un héros, un ami, un martyr de la Révolution.
Quant à la jeune meurtrière, elle est tout de suite arrêtée et conduite à la Conciergerie de Paris. En général, personne ne ressort jamais de cette prison surnommée l’antichambre de la mort.
Charlotte Corday : la femme en rouge, celle à abattre
Quatre jours plus tard, le Tribunal révolutionnaire la juge, nous sommes le 17 juillet 1793 à 8 h. Elle assume son geste et revendique son acte avec courage. Charlotte est persuadée, dit-elle, qu’en tuant Marat elle a sauvé cent mille vies.
Le code pénal de 1791, indique dans son article 4 :
« Quiconque aura été condamné à mort pour crime d’assassinat, d’incendie ou de poison, sera conduit au lieu d’exécution, revêtu d’une chemise rouge ».
Condamnée à mort, celle qui est appelée l’ange de l’assassinat, est menée à la guillotine, couverte du vêtement pourpre symbole de honte et d’infamie.
Nous sommes toujours le 17 juillet 1793, il est 18 h 30 sur la place de la Révolution à Paris, et le bourreau Sanson vient de faire perdre sa tête à Marie Anne Charlotte de Corday d’Armont.
Faits divers autour du prénom « Charlotte »
Elle signait « Marie »
De Marie Anne Charlotte de Corday d’Armont, son nom de naissance, l’histoire ne retient que Charlotte Corday. Pourquoi ? Alors qu’elle signe ses courriers de son premier prénom Marie !
À propos du 17 juillet
Le 17 juillet, est le jour où :
- l’on fête le prénom Charlotte et c’est le jour de son exécution ;
- le roi Louis XVI, en 1789, accepte la cocarde tricolore appelée alors cocarde royale et bourgeoise.
À Cayenne, Charlotte s’appelle Marianne, et à Caen elle est Marie !
Pour fêter le centenaire de la Révolution et la fin de la monarchie absolue, les cayennais ont commandé un buste de Marianne.
Le fondeur parisien Maurice Denonvilliers a épuisé son stock de Mariannes, alors il choisi d’utiliser celui de Charlotte Corday, auquel il ajoute un bonnet phrygien.
C’est ainsi que les guyanais baptisent du prénom de « Charlotte » leur Marianne qui s’appelle en fait de son vrai nom, Marie Anne !
Cette colonne de la République de la place des palmistes est aussi appelée « le buste de la reine Charlotte »… étrange pour une république.
La France n’attribue aucune figure officielle à Marianne. Cependant, il est étonnant de constater que le buste d’une « femme en rouge », donc meurtrière et guillotinée, soit validé pour représenter la liberté et la démocratie.
Quelques liens utiles
Charlotte Corday, Les Lignerits (Orne), 27 juillet 1768 – Paris, 17 juillet 1793, France Archives
Place de l’Esplanade, dite place des Palmistes, Monumentum
Place de l’Esplanade, dite place des Palmistes, POP
Charlotte DENOËL, Charlotte Corday, L’histoire par l’image, 2008
Code pénal de 1791 (Art 1 à 5), Crimino Corpus
Le procès de Charlotte Corday, Ministère de la justice
Colonne de la République – “Reine Charlotte” – Cayenne, E-monumen