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Gaza : dévastation ou espoir, quel avenir pour l’après-guerre ?

La signature d’un accord de paix à Gaza favorisera-t-elle la paix ou sera-t-elle au contraire le prélude à une nouvelle spirale de violence ?
Les Palestiniens récupèrent des objets dans les ruines de Gaza - UN Photo/Shareef Sarhan I Creative Commons BY-NC-ND 4.0
Les Palestiniens récupèrent des objets dans les ruines de Gaza – UN Photo/Shareef Sarhan I Creative Commons BY-NC-ND 4.0

Le 7 octobre 2024, cela fera un an que la guerre Israël-Hamas aura commencé. Entre affrontements intenses et destructions massives, le bilan est déjà terrible : 1500 morts pour l’État hébreu et plus de 40 000 pour la Terre Sainte au 7 août 2024, donc 39 623 sur la seule bande de Gaza. Les tensions sont donc plus que vives dans la région, accentuées chaque jour par une crise humanitaire profonde.

Face à cette situation chaotique, la communauté internationale cherche donc à répondre aux besoins urgents de la population de Gaza, tout en essayant de relancer un processus de paix pour l’instant à l’agonie. Mais pour y arriver, les dirigeants politiques doivent trouver la réponse à une question plus complexe encore : comment gérer l’après-guerre à Gaza ?

La signature d’un accord de paix favorisera-t-elle vraiment la paix ou sera-t-elle au contraire le prélude à une nouvelle spirale de violence ? Cette interrogation est aujourd’hui au coeur des débats de la communauté internationale, qui ne peut espérer négocier la paix sans prendre en compte tous les enjeux autour de l’avenir de Gaza et de la résolution durable du conflit israélo-palestinien. Zoom sur un sujet d’actualité brûlant.

Les racines du conflit israélo-palestinien : une histoire de tensions et de divisions

On ne peut évoquer l’après-guerre à Gaza sans évoquer d’abord le contexte historique et politique qui a mené au chaos qu’on lui connaît désormais.

La guerre entre Israël et le Hamas s’inscrit évidemment dans la lignée du conflit israélo-palestinien, qui a débuté dès 1948. Si le conflit ne s’essouffle pas plus de 75 ans après ses débuts, c’est parce que les démêlés autour des revendications territoriales et des différends religieux et ethniques sont toujours aussi forts.

Depuis une dizaine d’années, c’est la bande de Gaza qui est au cœur du conflit. Contrôlée depuis 2007 par le Hamas, elle a relancé la violence du conflit israélo-palestinien en devenant le symbole de la lutte palestinienne contre l’occupation israélienne. Elle a ainsi été avant aujourd’hui le théâtre de multiples guerres et escalades de violence entre la Palestine et Israël (2008-2009, 2012, 2014, 2021).

Et à force d’enchaîner les trêves temporaires, la divergence d’intérêts des différentes parties prenantes s’est en effet renforcée. Entre Israël et Palestine bien sûr, mais également entre le Hamas et l’Autorité palestinienne (AP). La scission politique en vigueur depuis 2007 entre Gaza et la Cisjordanie atteint désormais des sommets, affaiblissant clairement la position palestinienne dans ses rares négociations avec Israël. Comment ainsi espérer dans le futur proche une paix durable entre Israël et la Palestine si cette dernière continue de se déchirer sur la stratégie à adopter face à Israël ? Par ailleurs, il ne faut pas oublier que la paix dépend de la volonté de toutes les parties à s’engager dans un processus de paix durable, y compris les rivaux historiques que sont les États-Unis et la Chine par exemple..

Rebâtir Gaza : défis et enjeux d’une reconstruction incertaine

Une fois avoir réfléchi aux contextes historiques et politiques, penser l’après-guerre à Gaza passe par réfléchir à la question de la reconstruction, et aux défis socio-économiques que cela engendre.

Chaque guerre laisse à chaque fois Gaza dans un état de dévastation totale. Les infrastructures essentielles comme les hôpitaux, les écoles, et les réseaux d’eau et d’électricité sont d’ailleurs souvent les premières cibles, ce qui aggrave encore plus les conditions de vie déjà précaires des habitants.

C’est pourquoi l’après-guerre doit d’abord passer par une aide humanitaire massive, et des efforts de reconstruction. Seulement, l’entrée des matériaux de construction est strictement contrôlée, et les financements internationaux pour la reconstruction sont souvent limités par des conditions politiques, telle la démilitarisation du Hamas. A tout cela s’ajoute le blocus imposé par Israël et l’Égypte, qui rend difficile la reconstruction à grande échelle de Gaza.

De nouveaux problèmes apparaissent quand on se met à penser reconstruction à long terme. Jusqu’ici, toutes les infrastructures importantes de Gaza étaient certes reconstruites après la guerre, mais se faisaient détruire quelques mois ou années après quand celle-ci reprenait de plus belle. Un cercle vicieux dans lequel les dirigeants politiques ne doivent pas tomber à nouveau. Toutefois, sans changement significatif dans les relations avec Israël, le cycle est voué à perdurer encore longtemps…

Au-delà d’une reconstruction physique, les dirigeants politiques doivent aussi penser à une reconstruction socio-économique de Gaza. Considérée comme une prison à ciel ouvert, la ville se caractérise avant tout par une pauvreté extrême et un taux de chômage élevé. Ce dernier, qui atteignait 45% en 2021, atteint presque les 80% en 2024. Gaza serait ainsi incapable de subvenir à l’heure actuelle à ses propres besoins, d’où la nécessité d’un accompagnement international pour empêcher la ville de sombrer.

Mais pour améliorer les conditions de vie et apaiser les tensions, il faut que le processus politique soit solide. Si la jeunesse de Gaza devait continuer à grandir après la guerre dans la violence et le désespoir, faute de gestion efficace de la part de la communauté internationale, un cycle de radicalisation pourrait débuter, et déclencher a minima une guerre interne qui viendrait complexifier une nouvelle fois le conflit israélo-palestinien..

La communauté internationale face à Gaza : vers la paix durable ou un échec annoncé ?

La communauté internationale aura donc un rôle prépondérant dans l’après-guerre à Gaza. Seulement, il faut qu’elle tire des leçons des expériences passées pour favoriser une véritable réconciliation entre Israël et la Palestine. En effet, l’histoire montre que les périodes d’après-guerre dans la région ont souvent été des périodes de réarmement et de préparation pour la prochaine phase de conflit, plutôt que des moments propices à la paix.

Jusqu’ici, les efforts internationaux pour résoudre le conflit israélo-palestinien ont toujours échoué, en raison notamment du manque de suivi et de la complexité des intérêts en jeu. Les Accords d’Oslo de 1993 ou le “Plan de paix” de 2020 visaient certes l’apaisement, mais leur application inégale en faveur d’Israël a entraîné à chaque fois un rejet logique de la part des Palestiniens, puis par extension des Israéliens. À ce titre, les États-Unis, qui sont traditionnellement des alliés d’Israël, ne peuvent plus gérer seuls l’après-guerre, comme ils en ont encore l’habitude. C’est pourquoi une coalition internationale avec l’Union européenne et les pays arabes semble indispensable pour garantir la mise en œuvre d’accords équitables, et arriver finalement à une paix durable.

Le Premier ministre Yitzhak Rabin avec le président Clinton et Yasser Arafat pendant la signature des accords d’Oslo en 1993 – Forces de défense israéliennes | Creative Commons BY-NC 4.0

Une chose d’autant plus importante que le manque de confiance respective, la montée de la droite en Israël, et la perception que les pourparlers antérieurs ont échoué à apporter des résultats concrets pour les Palestiniens empêche toute possibilité de résolution du conflit entre les seuls principaux concernés.

Mais les acteurs internationaux ne doivent plus se contenter de faire les médiateurs en faveur d’accords ressemblant à une déclaration d’intentions. La négociation de l’après-guerre à Gaza doit être l’occasion d’évoquer les questions fondamentales du conflit israélo-palestinien, parmi lesquelles les frontières de 1967, le statut de Jérusalem, et le droit au retour des réfugiés palestiniens. Si ces interrogations restent des sujets tabous, l’après-guerre à Gaza risque de tourner une nouvelle fois au bain de sang.

L’après-guerre à Gaza : entre espoir de paix et crainte d’une nouvelle spirale de violence

Quels scénarios envisager alors pour l’après-guerre ?

Si l’on est optimiste, on peut croire en une paix durable soutenue politiquement par Israël et la Palestine, le tout avec un soutien international efficace. Pour cela, un processus de réconciliation politique interne en Palestine doit être mené en amont. Derrière, il est aussi nécessaire que soit négocié lors des accords de paix une levée partielle ou totale du blocus, des investissements massifs en infrastructures. Dès lors, l’après-guerre pourrait marquer le début d’une ère de reconstruction et de développement durable à Gaza.

Si l’on est au contraire pessimiste, on peut imaginer la période d’après-guerre à Gaza comme un moment creux qui ne servirait qu’à préparer le terrain pour un nouveau cycle de violence. Sans progrès politique, le blocus pourrait aussi se durcir, les conditions de vie continuer à se détériorer, et le Hamas pourrait se réarmer, ce qui provoquerait alors inévitablement une nouvelle escalade avec Israël.

Pour l’instant, aucun des scénarios n’est à valider ou à invalider. L’après-guerre à Gaza pourrait très bien favoriser la paix, mais cela dépend d’un ensemble de conditions favorables difficile à remplir. Tout dépendra donc de la capacité des parties à surmonter les obstacles historiques et à engager un dialogue constructif, ce qui n’est pas gagné d’avance. Une chose est sûre : l’après-guerre à Gaza ne peut ouvrir au mieux qu’à une paix fragile et conditionnelle. La prudence est donc de mise, aussi bien pour la communauté internationale que pour les spectateurs du conflit israélo-palestinien…

Quelques liens et sources utiles :

Dominique Perrin, Palestine : Une terre, deux peuples, Presses Universitaires du Septentrion, 2020

Bernard Ravenel, La résistance palestinienne : des armes à la non-violence, Editions L’Harmattan, 2019

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