L’histoire de la 2e DB, aussi appelée 2e Division Leclerc, est intimement liée à la Libération de la France, et en particulier de Paris. En effet, à partir du 21 août, le général de Gaulle presse le général Eisenhower d’envoyer la 2e DB de Leclerc participer à la libération de Paris.
Charles de Gaulle sait très bien que Paris doit être libérée par des forces françaises. S’il n’agit pas, l’encerclement allié sur Paris pourrait être suffisant pour réduire la défense allemande et libérer de facto la ville, mais il ne veut ni recevoir la ville de la part des Alliés, ni des résistants communistes, très présents à Paris.
Création de la 2e Division blindée
La 2e Division blindée n’a obtenu ce nom qu’à partir du 24 août 1943, après avoir connu le feu en Afrique du Nord, lors de l’opération Torch, puis de la confrontation des Alliés avec l’Afrikakorps de Rommel. Le colonel Leclerc et ses hommes sont intégrés dans la 8e armée britannique sous le nom de “Force L” en février 1943. Ils deviennent la 2e Division française libre (DFL) le 30 mai 1943.
Cette division naît de la volonté de Philippe Leclerc de Hauteclocque de continuer la lutte, malgré l’armistice signé entre l’Allemagne et la France de Vichy. Après s’être rendu à Londres le 24 juillet 1940 et avoir rencontré le général de Gaulle, il est envoyé rallier l’Afrique-Équatoriale française à la France libre.
France libre et Afrique, naissance du combat
Sans assise territoriale, il est impossible pour la France libre de mener le combat. Leclerc a donc pour mission de rallier bon nombre de colonies à leur cause. Il débarque le 20 août à Douala, la capitale du Cameroun. Il convainc les autorités de rallier la France libre. Il réussit à rallier toute l’Afrique-Équatoriale française (AEF) le 10 novembre 1940.
Le premier fait d’armes marquant de ses hommes est la prise de l’oasis de Koufra le 28 février 1941. Auparavant, il avait réalisé de nombreux raids dans le désert contre les troupes italiennes. La prise de Koufra est réalisée par surprise, avec un canon et 300 hommes. Un style de combat qu’il s’évertue à perfectionner et qui atteindra son paroxysme sur le sol français en 1944.
Jurez de ne déposer les armes que lorsque nos couleurs, nos belles couleurs, flotteront sur la cathédrale de Strasbourg.
2 mars 1941, le colonel Philippe Leclerc prête avec ses hommes le « serment de Koufra »
Jusqu’à la fin de l’année 1942, il participe activement aux combats dans le Nord de l’Afrique, notamment contre les Italiens installés dans le Fezzan. Au début de 1943, il est intégré dans la 8e armée britannique sous le nom de “Force L”. Cette force est renommée 2e Division blindée le 24 août 1943 et réorganisée pour correspondre au modèle américain. Elle est installée dans le camp de Temara au Maroc, pour être entraînée, équipée et complétée.
Débarquement en Normandie
Le 10 avril 1944, la 2e Division blindée est envoyée en Angleterre, affectée à la 3e armée américaine du général Patton. Les soldats de Leclerc arrivent en France. Néanmoins, ils ne font pas partie des troupes qui débarquent le 6 juin 1944, laissant cette place au Commando Kieffer, les seuls Français à débarquer ce jour-là.
La 2e Division blindée arrive en France le 1er août et débarque à Saint-Martin-de-Varreville, dans le secteur de débarquement d’Utah Beach. Les premières actions de la division se déroulent dans le Cotentin, puis se dirigent vers Vitré, Château-Gontier, puis Le Mans.
La 2e Division blindée est le fer de lance du 15e corps américain, mais Leclerc avance parfois trop vite, sans respecter les ordres. Malgré les éloges du général Patton, il est réprimandé par le général américain commandant la 5e DB américaine, pour avoir retardé la fermeture de la poche de Falaise-Argentan.
Il demande à quitter le théâtre normand pour se focaliser sur la libération de Paris. Lui, comme le général de Gaulle, s’impatiente de libérer Paris, qui, tout le monde le sait, est le pivot du pouvoir politique français et semble tomber sous le joug des communistes.
Libération de Paris
La 2e DB fait route vers Versailles et Paris le 22 août, avant de recevoir l’ordre du général Omar Bradley. Une énième initiative, qui confirme son insubordination. Néanmoins, il reçoit l’ordre le soir même.
Le haut commandement insiste pour que la France soit libérée par des Français, la 2e DB reçoit donc l’honneur d’être la première unité alliée à entrer dans Paris, les 24 et 25 août. Après quelques combats sporadiques, mais néanmoins violents, Dietrich von Choltitz, gouverneur militaire du “Grand Paris“, offre sa reddition aux soldats de la 2e DB.
Au même moment, dans le sud de la France, la 1re DB libère la ville de Marseille avec l’aide des résistants, notamment Gaston Defferre.
Le 26 août 1944, les deux généraux, de Gaulle et Leclerc, descendent l’avenue des Champs-Élysées. Pour de Gaulle, c’est la victoire militaire et politique qu’il attendait depuis l’appel du 18 juin 1940. Cette période d’isolement et de lutte prend tout son sens.
L’héritage de la 2e Division Leclerc
La Division Leclerc continue la guerre, notamment avec la libération de Strasbourg, objectif qu’elle s’était donné il y a 3 ans, en Afrique.
Le 1er septembre 1945, la division constitue un groupement de marche (GM) sous le commandement du lieutenant-colonel Massu. Ce groupement accompagne Leclerc au sein du Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient. Le GM engage les premiers combats contre le Việt Minh en Cochinchine, puis au Tonkin, avant d’être dissous en novembre 1946.
Les prisonniers de la Waffen-SS
Le 6 mai au matin, Leclerc s’installe à Bad Reichenhall, en Haute-Bavière, près de Berchtesgaden. Le même jour, douze Waffen-SS français de la division Charlemagne, capturés par les Américains, sont remis à la 2e DB. Leclerc, après un bref échange avec les prisonniers, aurait dit avec agacement : « Débarrassez-moi de ces gens-là ! » Les autorités de Paris, informées de l’existence des prisonniers, ne reçoivent plus de nouvelles après le 18 mai.
Les douze SS français sont exécutés les 7 ou 8 mai dans une clairière à Kugelbach par des soldats du régiment de marche du Tchad, assistés par le père Maxime Gaume. Aucune procédure judiciaire n’a été engagée pour cette exécution. La responsabilité de cet acte reste indéterminée. Le père Gaume aurait affirmé que la décision venait de « l’état-major » de la division, sans plus de précisions. Le lieutenant Morvan aurait évoqué « le haut état-major de la division » comme responsable.
Jean-Christophe Notin, biographe de Leclerc, considère impossible de déterminer si l’ordre d’exécution venait directement de Leclerc, potentiellement influencé par les horreurs de Dachau et l’arrogance des prisonniers, ou d’un autre officier supérieur. Il conclut que cette affaire, mêlant une figure emblématique de la Libération à une exécution sommaire, reflète les « horribles visages de la guerre ».
Quelques liens et sources utiles
Le jour le plus long, Le Figaro Hors-série, 2024
Pierre Coatpehen, En mission avec la 2e DB, Locus Solus, 2014
Guy Chauliac, Le service de santé de la France libre : du 18 juin 1940 au 1er août 1943, Paris, 1994
José Brice, Patton-Leclerc, éd. Société des Écrivains, 2014
Michel Marmin, Leclerc, Éditions Chronique, 2013