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Romorantin, nouvelle capitale française imaginée par De Vinci

De Vinci souhaite réaliser le rêve du roi de faire construire un château royal à Romorantin qui serait moderne et grandiose.
"François Ier reçoit les derniers soupirs de Léonard de Vinci". Huile sur toile, 1818. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit-Palais - Jean-Auguste-Dominique Ingres | Domaine public
“François Ier reçoit les derniers soupirs de Léonard de Vinci”. Huile sur toile, 1818. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit-Palais – Jean-Auguste-Dominique Ingres | Domaine public

En 1516, Léonard de Vinci quitte l’Italie pour rejoindre la France à la demande du jeune roi François Ier. Du fait de la certaine renommée de l’artiste, cette venue souligne la puissance de la France. Néanmoins, pour le faire venir, le roi de France lui promet une pension annuelle de mille écus d’or, le château du Cloux (nommé plus tard château du Clos Lucé) ainsi que le titre de premier peintre, premier ingénieur et premier architecte du roi.

En ce titre, De Vinci réalise de nombreux souhaits du roi. Parmi eux figure le rêve de faire construire un château royal à Romorantin qui serait un symbole de modernité et de puissance.

La nature du projet : la construction d’une cité idéale

Vingt ans auparavant, Léonard de Vinci conçoit déjà à Milan un projet de cité idéale. Il commence à l’imaginer alors qu’il est envoyé par Machiavel comme ingénieur militaire auprès de César Borgia.

Dans ce rôle, il étudie la cartographie et l’organisation des agglomérations ce qui lui donne la possibilité de réaliser les premiers plans d’une ville moderne. En 1506, il imagine également une villa avec d’importants jeux d’eau pour Charles d’Amboise à Milan. Sa conception de la ville est un aboutissement de l’utopie de cité idéale. Elle serait ainsi humaniste, moderne et le plus éloigné possible de l’organisation de la ville médiévale : insalubre et désordonnée.

Le palais royal de François Ier

Ces projets de cité idéale entrent en résonance avec le projet du roi François Ier de faire construire un immense palais royal.

Portrait du roi François Ier vers 1530 - Jean Clouet | Domaine public
Portrait du roi François Ier vers 1530 – Jean Clouet | Domaine public

Le roi rencontre des problèmes pour loger sa cour à Amboise qui est de plus en plus importante. Il demande alors à Léonard De Vinci de lui construire un palais moderne qui permettrait d’accueillir l’ensemble de sa cour ainsi que son administration implantée jusqu’alors à Tours.

Il souhaite un ensemble impressionnant qui reflète la grandeur de la France qui est revenue victorieuse d’Italie.

La rencontre entre le génie de De Vinci et le rêve du roi de France occasionne la conception de plans d’un château hors norme.

Selon les plans de De Vinci, le château aurait des portes qui se fermeraient grâce à des systèmes de contrepoids ou encore des escaliers similaires à ceux, plus tardif, du château de Blois. Les plans font également référence à des bâtiments spéciaux destinés aux écuries royales et à des maisons pour la cour du roi.

Par toutes ces spécificités, le château que prévoit Léonard De Vinci pour la ville de Romorantin est grandiose et particulièrement moderne pour l’époque.  

Le choix de l’emplacement : pourquoi Romorantin ?

La ville de Romorantin se situe en Sologne aux abords de la Sauldre. Il s’agit d’une région marécageuse qu’il est nécessaire d’assainir. Cependant, la présence de ce cours d’eau permet une source d’eau de proximité qui apporterait de nombreux atouts pour ce futur château.

Un choix hydronymique

Elle permettrait effectivement la tenue de spectacle sur l’eau ainsi que l’approvisionnement en eau du château et de sa population. Léonard De Vinci produit, dans ce but, une étude rigoureuse de cette région où il projette de l’assainir et de la fertiliser. Le projet est réalisable puisqu’il a déjà asséché des marais aux environs de Rome et de Venise.

Il conçoit même le projet de rapprocher cette région de son Italie natale en reliant les régions de la Touraine et du Lyonnais via la rivière de la Saône.   

Un choix géostratégique

Le contexte politique implique que le pouvoir est délocalisé à Tours depuis la guerre de Cent Ans par manque de sûreté de Paris. Néanmoins, la ville de Tours ne peut pas être agrandie à cause de sa proximité avec la Loire et le Cher.

Le site de Romorantin, étant alors qu’une petite ville et se situant dans le Val de Loire, répond aux attentes respectives du roi et de De Vinci. En effet, il se situe à proximité de Tours et il permet de construire un site à partir d’un terrain vierge. Ils souhaitent, en effet, construire une nouvelle ville à côté de l’ancienne.

Un choix symbolique

La présence du palais à Romorantin de Louise de Savoie, mère de François Ier a pu être déterminante dans la conception de ce projet. Le roi a, en effet, vécu une grande partie de son adolescence dans ce palais. De plus, Louise de Savoie entreprend d’importants travaux de modernisation de ce palais en 1512.

Ceux-ci comprennent notamment l’agrandissement de l’enceinte du bâtiment. Dans le même temps, la ville entreprend des travaux de pavage des rues, de réparation des portes et des murailles et de réhabilitation des fossés. Il s’agit de conditions qui laissent envisager la mise en place de travaux plus conséquents comme le château royal souhaité par François Ier.

Rêve irréalisable ou projet trop coûteux : pourquoi l’idée a-t-elle été abandonnée ?

Avant sa mort, Léonard De Vinci fait rehausser le terrain de quatre mètres et débute des travaux de canalisation à Romorantin. Toutefois, il ne reste aujourd’hui de ce projet que la trace des dessins de Léonard De Vinci dans ses codex.

Plusieurs raisons sont avancées pour expliquer le fait que ce projet n’est pas abouti. La première est que la mort de l’architecte et le manque d’ouvriers qualifiés ont pu démotiver les acteurs du projet. L’autre raison est que le projet est très ambitieux mais aussi très coûteux.

Le roi François Ier a donc pu se détourner de Romorantin pour se concentrer davantage sur d’autres projets comme le Château de Chambord. Les travaux de ce dernier débutent, par ailleurs, en 1519 à la suite du décès de Léonard De Vinci.   

Et que reste-t-il de Romorantin aujourd’hui ?

Le château imaginé par Léonard De Vinci n’a donc jamais vu le jour dans le paysage solonien, mais il est possible de se rendre compte de l’aspect grandiose de ce projet au musée de Sologne. Celui-ci expose une maquette réalisée à partir des dessins de Léonard De Vinci.

Croquis attribué à Léonard de Vinci, encre sur papier, XVIème siècle - Institut de France | Domaine public
Croquis attribué à Léonard de Vinci, encre sur papier, XVIème siècle – Institut de France | Domaine public

Le projet de faire de Romorantin le centre politique du royaume de France n’est finalement resté qu’un projet parmi d’autres. L’idée de Léonard De Vinci a tout de même influencé certains édifices bien réels tels que le Château de Chambord notamment par son architecture. Ce dernier est tout de même plus modeste par rapport au projet voulu pour Romorantin, car il représentait quatre fois le Château de Chambord.

À l’image de ce projet innovant et grandiose, Léonard De Vinci invente et se réinvente tout au long de sa vie pour permettre la mise en place de concepts tous plus fous les uns que les autres. Par exemple, il est un précurseur de l’invention du char d’assaut ou du parachute.

Quelques liens et sources utiles

Boriaud, Jean-Yves. « 17. Grands et petits projets français », Léonard De Vinci. sous la direction de Boriaud Jean-Yves. Perrin, 2021, pp. 291-310.

Brioist, Pascal, et al., ed. Louise de Savoie (1476-1531). Tours : Presses universitaires François-Rabelais, 2015.

Chauveau, Sophie. « Quatrième partie (1513-1519) », Léonard De Vinci. sous la direction de Chauveau Sophie. Gallimard, 2018, pp. 209-264.

Franceinfo, « Léonard De Vinci : son histoire secrète avec la France », 16 octobre 2019

France 3 Centre Val de Loire « Romorantin : Léonard De Vinci voulait construire une ville nouvelle quatre fois plus grande que Chambord », 21 mars 2019

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