Vauban : l’ascension d’un grand stratège au service de la France (1667-1688)

L’œuvre de Vauban est gigantesque et se répercute à travers les siècles qui l’on suivi. Intéressons-nous aux principaux sièges et fortifications à travers lesquels Vauban a exprimé son génie.
Siège de Gravelines-1652 - Peter Snayers I Domaine Public
Siège de Gravelines-1652 – Peter Snayers I Domaine Public

Sommaire

L’œuvre de Vauban est gigantesque et se répercute à travers les siècles qui l’on suivi. Pendant toute sa vie, l’homme à la fois militaire ingénieur et architecte participe à de nombreux sièges et construit de nombreuses forteresses et ouvrages civils.

Le futur maréchal de France est pourtant né dans la misère. Les Vauban sont en effet une famille d’aristocrates peu fortunés et l’enfant grandit dans une simple maison en chaume dotée d’une seule chambre et d’une petite écurie. Instruit par un abbé, le jeune homme se voue à la vie militaire et rentre au service du Grand Condé pendant la période de la Fronde. Dans les années 1650, il s’occupe alors des travaux de siège contre les armées du roi de France Louis XIV avant de rejoindre ce dernier suite à une captivité. Vauban s’apprête alors à dédier sa vie à la défense du royaume de France dans les décennies suivantes.

A cette période où Vauban combat pour Louis XIV, plusieurs guerres opposent les Bourbon et les Habsbourg  pour la domination de l’Europe. La France est ainsi opposée à une alliance de nations formée principalement par l’Espagne, l’Allemagne, l’Autriche et les Pays Bas dans une série de conflits qui se succèdent :

  • La Guerre de Dévolution de 1667 à 1668 entre la France et l’Espagne où Louis XIV réclame la Franche Comté et la Flandre au Roi d’Espagne.
  • La Guerre de Hollande de 1672 à 1678 engagée par la France pour combattre la première puissance économique qu’étaient les Provinces Unies.
  • La Guerre de la Ligue d’Augsbourg de 1688 à 1698 engagées par les Habsbourg pour protester contre l’abrogation de l’Edit de Nantes marquant l’interdiction du protestantisme et les multiples annexions françaises en Allemagne.
  • La Guerre de Succession d’Espagne de 1701 à 1714 pour nommer le futur roi d’Espagne.

Intéressons-nous aux principaux sièges et fortifications à travers lesquels Vauban a exprimé son génie.

Vauban, un génie dans l’art des sièges

Vauban participe à près de 50 sièges dans sa vie et l’officier perfectionne au fil des années les tactiques de sièges afin de gagner du temps, de limiter l’utilisation de ressources et de diminuer le nombre de morts.

Pour Vauban, un siège s’organise ainsi en respectant un nombre d’étapes bien précis.

  • D’abord, on creuse les lignes de contrevallation pour empêcher les assiégés de s’échapper
  • Puis on creuse les lignes de circonvallation pour interdire à de potentiels renforts de venir de l’extérieur
  • Ensuite, on creuse les tranchées ouvertes en zig-zag pour s’approcher de la place forte et trois lignes pour bombarder la ville
  • Enfin, on peut commencer le travail de sape des fortifications ennemies consistant à creuser des cavités sous les ouvrages et à les faire exploser, afin de les détruire et de pouvoir rentrer dans la ville.

En 1667 dans le cadre de la guerre de Dévolution, l’armée française envahit avec 55 000 hommes les Pays-Bas espagnols. Vauban est chargé de l’attaque de plusieurs places fortes : Charleroi, Tournai, Douai. Grâce à son ingéniosité, les villes tombent chacune en l’espace de quelques jours.

traité des sièges et de l’attaque des places p26 sebastien le prestre de vauban bnf i domaine public
Traité des sièges et de l’attaque des places P26 – Sebastien le Prestre de Vauban – Bnf I Domaine Public

Quelques semaines plus tard, la conquête de Lille, place forte de la région, lui est ainsi confiée. Louis XIV vient en personne accompagné de son ministre Louvois et du maréchal de Turenne pour observer chaque jour l’avancement des travaux.

En moins de trois semaines, la capitale des Flandres capitule. Vauban gagne ainsi rapidement la confiance du roi Louis XIV, et de ses ministres Louvois et Colbert. Vauban est récompensé en étant nommé lieutenant de garde avec une pension annuelle de 2400 livres.

Vauban veut protéger la vie des soldats en épargnant toute charge inutile comme lors de certains sièges qu’il ne supervisait pas entièrement. C’est ainsi que lors de la conquête de Maastricht lors de la guerre de Hollande en juin 1673, une attaque des Français est arrêtée nette par les assiégés et entraine la mort de plusieurs dizaines d’hommes dont le célèbre capitaine des mousquetaires Charles de Batz de Castelmore plus connu sous le nom de d’Artagnan.

Vauban se retrouve une seule fois dans la position d’assiégé à Oudenarde en Flandre en septembre 1674 où il défend la ville contre les troupes du prince d’Orange. L’officier attend alors que les ennemis creusent les tranchées puis inonde les assiégés avec l’eau du canal de Tournai qu’il a fait détourner.

L’armée française investit quelque temps plus tard la Wallonie avec 300 000 hommes. Les Français se dirigent vers Gand et le siège de la ville débute au début de l’année 1678. Vauban séjourne dans un village à proximité afin d’étudier les fortifications et l’état de la garnison. Lorsque Louis XIV arrive au campement français devant la ville, Vauban lui dit :

« Votre Majesté n’aura pas à tirer l’épée du fourreau ; l’affaire sera simple et courte ». (Vauban à Louis XIV)

La ville tombe cinq  jours plus tard.

En 1684, lors du siège de Luxembourg, Vauban supervise le siège de la citadelle avec sous ses ordres, près de 60 ingénieurs et fait tomber la ville en un mois.

Lors de la guerre contre la ligue d’Augsbourg à partir de 1688 (guerre opposant l’Espagne, la Suède, les princes de Saxe, l’électeur de Bavière à la France pour la conservation de l’Allemagne), l’armée française franchit le Rhin.  Vauban conduit le siège de Philippsbourg, de Manheim et de Frankenthal donnant ainsi la victoire à la France. C’est à cette période que l’officier invente le tir par ricochet permettant au boulet de canon de rebondir avant d’atteindre les défenses adverses.

Peu de temps plus tard, la France envahit les Pays Bas espagnols. Vauban dirige avec succès le siège de Mons en 1691, Namur en 1692, Charleroi en 1693 et Ath en 1697.

Un véritable maître dans l’art des constructions

Vauban excelle aussi dans l’art des constructions de places fortes. On lui doit ainsi plus d’une centaine de fortifications tout au long de sa vie.

Ainsi, 12 de ces forteresses sont inscrites au patrimoine mondial de l’Unesco : Arras, Besançon, Cussac-Fort-Médoc, Briançon, Camaret-sur-Mer, Longwy, Mont-Dauphin, Mont-Louis, Neuf-Brisach, Saint-Martin-de-Ré, Tahitou et la Hougue, Villefranche-de-Conflent.

En juin 1660, Vauban est chargé par Louis XIV de raser les fortifications de la ville de Nancy, cédée par le duc de Lorraine Charles IV au royaume de France. Il reconstruira des fortifications sur cette même place quelques années plus tard.

Vauban est nommé pour réaliser les fortifications de la ville de Lille en 1667 puis pour la construction de la citadelle d’Arras.

louis xiv au siège de besançon adam frans van der meulen 1674 i domaine public
Louis XIV au siège de Besançon – Adam Frans van der Meulen – 1674 I Domaine Public

En 1668, Vauban est chargé par Louvois de l’inspection des frontières du royaume de France. L’ingénieur parcourt ainsi à cheval la France de long en large, entre Lille et Perpignan et entre Brest et Strasbourg. Les inspections des fortifications sur les frontières lui font effectuer parfois plusieurs milliers de kilomètres par an.

En 1678 à la mort de son premier commandant, le chevalier de Clerville, Vauban devient commissaire général des fortifications. Il fait ainsi fortifier les villes de l’est de la France dont Metz, Verdun et Besançon puis dans le sud-ouest avec les villes de Bayonne, Saint-Jean-Pied-de-Port, Hendaye.

En 1679, Vauban se rend à Toulon qu’il qualifie de «  plus beau port de l’Europe, situé dans la meilleure rade » et convainc Colbert de fortifier cette place stratégique.

De 1661 à 1706, Vauban supervise la construction de l’œuvre de sa vie : les fortifications de Dunkerque. Jusqu’à 30 000 hommes travaillent et se relaient jours et nuits. L’ouvrage inclut à la fin des travaux des forts extérieurs empêchant des navires ennemis d’approcher, un chenal pour faire rentrer les bateaux alliés, des fortifications protégeant le port et un camp retranché pour loger les hommes et stocker les munitions.

Les travaux de Vauban dans la tentative d’acheminement d’eau à Versailles

Vauban participe également à des travaux d’ouvrages civils pour le roi Louis XIV.

En 1685, Louis XIV voulait faire de Versailles le plus beau château sur Terre et il demande des jardins magnifiques dotés de multiples fontaines. Mais ces jardins demandent une source d’eau importante pour les approvisionner. Ainsi, après l’échec du détournement de la Bièvre et de la machine de Marly dont le but était de remonter les eaux de la Seine, le roi demande à ses ministres de trouver une nouvelle solution.

Colbert demande à l’ingénieur Riquet, connu pour la construction du canal du Midi et à Vauban de trouver une solution pour approvisionner Versailles. Riquet souhaite ainsi faire venir les eaux de la Loire à Versailles. Mais ce projet s’avère vite irréalisable et est abandonné.

Vauban propose de détourner les eaux de l’Eure, alors distante de 80 km. Louvois approuve le projet mais impose une série d’aqueducs massifs en pierre quand Vauban veut utiliser de simples canalisations en acier enterrées.

Le roi approuve le projet et Vauban doit suivre les plans de Louvois. Il est ainsi chargé de diriger la construction de l’aqueduc de Maintenon, permettant d’amener l’eau jusqu’à Versailles en franchissant la vallée de l’Eure. La construction débute en 1685 et près de 22 000 soldats et 6 000 chevaux sont réquisitionnés pour effectuer les travaux. Vauban n’approuve pas le projet mais doit se charger de l’exécuter.

Mais un certain nombre de problèmes surviennent rapidement comme le financement des ouvrages et les conditions de travail des soldats qui subissent les chaleurs de l’été et tombent malades. Ainsi en deux ans, on dénombre plus d’un millier de morts. Mais la guerre reprend en 1688 et l’ouvrage est abandonné.

Avec la Guerre de la Ligue d’Augsbourg  qui débute en 1688 et la Guerre de Succession d’Espagne de 1701, Vauban repart en guerre et s’apprête à y montrer toute l’étendue de son talent.

Quelques liens et sources utiles

Joachim Ambert, Le Maréchal de Vauban (1633-1707), Hachette Livre BNF, 1882

Bernard Crochet, Vauban et la fortification du royaume, 2023

Marcel Poullin, Vauban, l’ingénieur, l’économiste, Hachette Livre BNF, 1891

Dominique Le Brun, Vauban: L’inventeur de la France moderne, Vuibert, 2023

Articles similaires

Ailleurs sur le web !

Résume l'article avec l'IA

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Résume l'article avec l'IA

Sommaire

Rejoignez la Newsletter Revue Histoire !

10% de réduction sur la boutique lors de votre inscription ! Des articles, des ressources et des contenus exclusifs 😃