Jeanne du Barry : la dernière favorite de Louis XV

Née Jeanne Bécu en 1743, future Jeanne du Barry s’impose comme l’ultime favorite de Louis XV dans un Versailles crépusculaire.
Fête donnée à Louveciennes, le 2 septembre 1771 - Jean-Michel Moreau (musée du Louvre, 1771) | Domaine public
Fête donnée à Louveciennes, le 2 septembre 1771 – Jean-Michel Moreau (musée du Louvre, 1771) | Domaine public

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Née Jeanne Bécu en 1743, future Jeanne du Barry s’impose comme l’ultime favorite de Louis XV dans un Versailles crépusculaire. Son parcours mêle ascension fulgurante, rivalités de cour et mécénat éclairé à Louveciennes, avant une fin tragique sous la Terreur.

Nous revenons sur ses origines, son rôle auprès du roi, son image publique — entre légende noire et réalité —, puis sur son héritage artistique (Fragonard, Vigée Le Brun, Claude-Nicolas Ledoux). Elle fut la « dernière favorite officielle de Louis XV », formule qui condense à elle seule l’imaginaire attaché à son nom et au fin du règne.

Origines et ascension à Versailles (1768–1769)

Fille illégitime d’Anne Bécu, Jeanne grandit loin des dorures et apprend tôt les sociabilités urbaines de Paris. Sa beauté et son esprit la rapprochent des cercles mondains où l’entremise de Jean-Baptiste du Barry puis du duc de Richelieu la met en vue du souverain.

Pour satisfaire l’étiquette, elle épouse Guillaume du Barry, avant d’être présentée à la cour et installée à Versailles. À la différence de Madame de Pompadour, son rôle demeure surtout mondain et affectif auprès d’un roi vieillissant : proximité, conversation, divertissements, mécénat.

Louis XV l’« entoure de faveurs », mais que cette promotion alimente aussitôt une hostilité sourde des factions ministérielles et des pamphlétaires. Derrière les clichés, son insertion dans l’étiquette révèle une femme qui apprend la cour, maîtrise les codes vestimentaires et s’approprie les usages — préséances, visites, cérémonial —, tout en négociant sa place entre favoris du roi, ministres et princes du sang.

Vie de cour : image publique, rivalités et mécénat

Devenue figure visible de l’Ancien Régime, Jeanne du Barry cristallise un rejet nourri par les adversaires du duc de Choiseul et par une opinion qui s’empare du thème de la « maîtresse ». Sa relation glaciale avec la jeune Marie-Antoinette accentue le contraste. La dauphine « refusa pendant longtemps de lui adresser la parole ».

Pourtant, la favorite ne se réduit pas à la caricature. Elle cultive un goût néo-classique, soutient des artistes et façonne des lieux : le pavillon de musique à Louveciennes (architecte Ledoux), des décors confiés à Fragonard (Les Progrès de l’Amour dans le coeur d’une jeune fille), un entourage d’artisans et de marchands-merciers.

Photo d'une page de la revue Le Tour de France, première année, 1880, Pavillon de musique, Louveciennes - Fabrice Dury  | Domaine public
Photo d’une page de la revue Le Tour de France, première année, 1880, Pavillon de musique, Louveciennes – Fabrice Dury | Domaine public

Cette action, souvent mésestimée, éclaire le rôle des favorites comme passeuses de styles et curatrices avant la lettre. En filigrane, sa réputation illustre les tensions entre morale, politique et culture matérielle à la cour.

Après Louis XV : retraits, Révolution et exécution (1774–1793)

La mort de Louis XV en 1774 entraîne l’éloignement de Jeanne du Barry au couvent du Pont-aux-Dames puis son retrait à Louveciennes. Elle y mène une existence plus discrète, protège ses biens, et entretient une relation avec le duc de Brissac.

Les années révolutionnaires changent l’équation : allées et venues, suspicions d’incivisme, perquisitions, interrogatoires. L’emballement de 1793 la conduit devant le Tribunal révolutionnaire ; la procédure, rapide, la condamne à mort.

Elle est « guillotinée le 8 décembre 1793 ». Au-delà du destin individuel, l’affaire du Barry révèle la bascule d’un monde : ce qui fut jadis grâce royale devient crime politique, et la faveur, autrefois instrument de gouvernement, se retourne en chef d’accusation dans une France qui refonde ses normes.

Héritage et postérité de Jeanne du Barry

La mémoire de Jeanne du Barry oscille entre mythe et réévaluation. Les historiens soulignent désormais une influence moins politique que culturelle : commandes, décor et arts décoratifs.

Ses portraits – notamment celui de Vigée Le Brun (1782) – donnent à voir une esthétique entre grâce et autorité. Le pavillon de Louveciennes reste un jalon de l’architecture de Ledoux, tandis que l’épisode des toiles de Fragonard continue d’alimenter la réflexion sur le goût et la commande au XVIIIᵉ siècle.

Dans la culture populaire, le film Jeanne du Barry (2023) a relancé l’intérêt du grand public, confirmant que son nom demeure un symbole de la fin de l’Ancien Régime. À l’échelle du patrimoine, sa trajectoire illustre comment les femmes de cour participent à la diffusion artistique et à la construction d’une mémoire visuelle durable.

Information sur Jeanne du Barry

  • Identité : Jeanne Bécu (1743–1793), dite comtesse du Barry, dernière favorite officielle de Louis XV.
  • Présentation à la cour : 1769, après mariage de convenance (1768) avec Guillaume du Barry pour satisfaire l’étiquette.
  • Rôle : surtout mondain et culturel (compagnie du roi, mécénat), peu politique.
  • d : pavillon de musique attribué à Claude-Nicolas Ledoux (années 1770), jalon du néo-classicisme.
  • Commandes artistiques : Fragonard, cycle Les Progrès de l’Amour dans le coeur d’une jeune fille ; portraits par É.-L. Vigée Le Brun (notamment 1782).
  • Rivalités : hostilité des réseaux Choiseul ; Marie-Antoinette lui refuse la parole un temps.
  • Fin de règne : mort de Louis XV (10 mai 1774), exil au Pont-aux-Dames, retrait à Louveciennes.
  • Révolution : procès (7 déc. 1793) devant le Tribunal révolutionnaire ; exécution le 8 décembre 1793 à Paris.

Les questions clés sur Jeanne du Barry

Pourquoi Jeanne du Barry a-t-elle été guillotinée en 1793 et quels chefs d’accusation ont été retenus ?

Guillotinée le 8 décembre 1793, elle est condamnée pour incivisme et correspondances avec l’ennemi après des allers-retours en Angleterre pour récupérer ses bijoux volés.

Le Tribunal révolutionnaire lui reproche aussi d’avoir secouru des émigrés et d’entretenir des relations suspectes avec l’étranger. Son procès, bref, s’inscrit dans la Terreur. L’affaire cristallise la suspicion envers les anciennes favorites et la culture de cour honnie par la Révolution, où la faveur royale devient indice de trahison.

A-t-elle exercé une influence politique ou surtout un rôle de sociabilité et de mécénat à Versailles ?

Son influence politique directe paraît limitée. Elle ne dirige pas les ministères, mais pèse sur les réseaux de cour (accès au roi, recommandations, grâces). Elle est souvent associée à la disgrâce de Choiseul (1770), rôle que les historiens jugent indirect. Là où elle excelle : sociabilité, étiquette, modes, et surtout mécénat. À Louveciennes, elle commande bâtiments, décors et œuvres (de Ledoux à Fragonard, puis Vigée Le Brun), orientant le goût de la fin du règne plus qu’elle n’oriente la politique.

Où voir aujourd’hui les lieux et œuvres associés à Jeanne du Barry (Louveciennes, Fragonard, Vigée Le Brun) ?

Pour les lieux, viser Louveciennes (Pavillon de musique de la comtesse du Barry, chef-d’œuvre de Claude-Nicolas Ledoux, ouvert ponctuellement). À Versailles, des visites guidées évoquent ses appartements et la vie des favorites. Pour les œuvres : les panneaux des Progrès de l’Amour de Fragonard sont conservés à la Frick Collection (New York).

Un célèbre portrait de Vigée Le Brun (1782) se voit à la National Gallery of Art (Washington). Compléter avec la base du Louvre pour décors et objets.

Quelques sources utiles

Virginie Ancelot, Les Salons de Paris : Foyers éteints, Paris, Éditions Jules Tardieu

Marc Lemonier, La petite histoire des courtisanes, Primento Digital Publishing, 2018

Emmanuel de Waresquiel, Jeanne du Barry: une ambition au féminin, Paris, Tallandier, 2023

Cécile Berly, Les femmes de Louis XV, Place des éditeurs, 3 mai 2018

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