L’opération Barbarossa, lancée le 22 juin 1941, marque le début de l’invasion de l’Union soviétique par l’Allemagne nazie. Cette offensive, la plus vaste de l’histoire militaire, s’étend sur un front de 2 900 kilomètres.
Pendant les premières semaines, la Wehrmacht avance à une vitesse fulgurante, mais la résistance soviétique, bien que désorganisée, commence à ralentir son élan. Cet article explore les points de vue allemand et soviétique sur cette phase initiale, qui s’est avérée décisive pour la suite du conflit.
Le point de vue allemand : la fulgurance de la Blitzkrieg
À l’aube du 22 juin 1941, plus de trois millions de soldats allemands, appuyés par 3 600 chars et 2 700 avions, franchissent les frontières soviétiques. Les groupes d’armées Nord, Centre et Sud lancent des offensives simultanées, frappant avec une rapidité déconcertante. La tactique allemande, la Blitzkrieg (guerre-éclair), vise à désorganiser l’Armée rouge en concentrant des frappes massives sur des points stratégiques avant de progresser en profondeur.
Les premiers jours de l’invasion sont marqués par des succès spectaculaires. Le groupe d’armées Centre encercle rapidement des milliers de soldats soviétiques près de Minsk, capturant environ 300 000 prisonniers. Pendant ce temps, le groupe d’armées Sud progresse en Ukraine, menaçant Kiev, et le groupe d’armées Nord se dirige vers Leningrad.
Les défis logistiques
Cependant, cette avancée rapide cache des défis logistiques majeurs. Les troupes allemandes doivent parcourir de vastes distances à travers des infrastructures souvent inadaptées, notamment des routes en mauvais état.
La dépendance aux lignes de ravitaillement allongées ralentit le rythme de l’offensive. Malgré les victoires initiales, la Wehrmacht commence à ressentir l’usure, un problème exacerbé par la taille du territoire soviétique.
L’illusion d’une victoire facile
Les premiers succès renforcent la confiance du haut commandement allemand, persuadé que l’Union soviétique s’effondrera rapidement. Cette illusion est alimentée par la capture massive de soldats soviétiques et la désorganisation apparente de l’Armée rouge.
Pourtant, des signes de résistance apparaissent déjà, préfigurant les difficultés à venir.
Le point de vue soviétique : surprise et désorganisation
Malgré les multiples avertissements des services de renseignement soviétiques, l’attaque allemande prend Staline et son état-major par surprise. Dans les premières heures de l’invasion, les forces soviétiques subissent des pertes catastrophiques. L’aviation soviétique, immobilisée au sol, est décimée : près de 2 000 avions sont détruits en un seul jour. Les unités terrestres, mal coordonnées, sont incapables de contenir l’offensive.
L’effet de surprise est aggravé par les ordres initiaux de Staline, qui interdit toute retraite. Les troupes soviétiques, encerclées, se retrouvent souvent coupées de leurs renforts et de leurs ravitaillements. Les encerclements massifs, comme ceux de Minsk et de Smolensk, entraînent des pertes humaines et matérielles colossales.
Une résistance désespérée
Malgré la désorganisation initiale, des poches de résistance désespérée commencent à se former. Les soldats soviétiques, souvent mal équipés et mal formés, opposent une résistance acharnée pour ralentir l’avancée allemande. Des villes comme Kiev et Smolensk deviennent des points de fixation, permettant à l’Armée rouge de réorganiser ses forces en retrait.
Staline, prenant conscience de la gravité de la situation, décrète le « ordre N°270 », ainsi tous les militaires qui se rendent seront dorénavant déclarés déserteurs et seront passés par les armes, de plus leurs proches seront considérés comme « famille d’ennemi du peuple » et secondement que résister par tous les moyens est obligatoire pour tout militaire, quel que soit son grade et son affectation.
L’évacuation industrielle
Dans l’urgence, les autorités soviétiques mettent en œuvre une évacuation massive des industries stratégiques vers l’est, loin de la ligne de front. Des usines entières sont démontées et transportées en Sibérie ou dans l’Oural, où elles continuent à produire des armes et des équipements essentiels.
Cette initiative, bien que chaotique, jouera un rôle crucial dans la capacité de l’Union soviétique à soutenir un effort de guerre prolongé.
Un affrontement déséquilibré mais révélateur
La première phase de l’opération Barbarossa, de juin à juillet 1941, est marquée par un déséquilibre flagrant entre les capacités allemandes et soviétiques. La Wehrmacht, grâce à sa tactique de Blitzkrieg, inflige des défaites écrasantes à l’Armée rouge, mais elle sous-estime la capacité de résistance et de mobilisation de l’Union soviétique.
Du côté soviétique, la désorganisation initiale et les lourdes pertes révèlent les failles du commandement et de la préparation militaire. Pourtant, la résistance acharnée des soldats soviétiques et la réorganisation stratégique commencent à freiner l’élan allemand, posant les bases d’une contre-offensive future.
Quelques liens et sources utiles
Jean Lopez, Lasha Otkhmezuri, Barbarossa : 1941. La Guerre absolue, Le Livre de Poche, 2021
Julian Semenov, Monique Slodzian, Opération Barbarossa, Editions du Canoë, 2021
David Stahel, Operation Barbarossa and Germany’s Defeat in the East, Cambridge University Press, 2009
Evan Mawdsley, Thunder in the East: The Nazi-Soviet War, 1941-1945, Bloomsbury Academic, 2007
Richard Overy, Russia’s War: A History of the Soviet Effort, 1941-1945, Penguin Books, 1998
John Erickson, The Road to Stalingrad: Stalin’s War with Germany, Yale University Press, 1975