L’écriture et la lecture sont des arts fondamentaux dans notre société actuelle comme dans la société médiévale du Moyen Âge central. Elle est synonyme de pouvoirs, puissance et privilèges dans le début du XIe siècle. L’Église et les monastères qui au XIe siècle possèdent le monopole de la culture écrite et de la langue ont rapidement été repoussé dans leurs retranchements. Lire et écrire comme instrument du pouvoir durant le Haut Moyen Âge.
Comment et pourquoi l’église perd l’hégémonie de l’écriture et de la lecture de la langue latine entre le XIe siècle et le XIVe siècle ?
La langue latine, et les langues maternelles
On dit qu’au début de cette tranche l’Église à le monopole, parce qu’au terme des différents événements qui ont bordé le XIe siècle au XIVe siècle, elle perdra petit à petit ce monopole. Si on considère l’ensemble de l’Occident, les historiens pensent que c’est le tour de « babel », en effet, chaque peuple à sa langue et son « diglossie« . La « diglossie » c’est le fait d’avoir deux langues qui ont chacune un usage différent selon les contextes.
Les hommes d’Église naissent avec leurs langues dites « vulgaire » ou « vernaculaire » qui est donc leurs langues maternelles, puis apprennent le latin pour la messe et les études bibliques. Mais au cours du IXe siècle, un événement majeur marque un recul dans l’apprentissage du latin. En effet, le concile de Tours en 813, les fidèles et les clercs acte de prêcher dans leurs langues vernaculaires pour aider les fidèles. Cela nous montre que la latin a toujours posé problème dans la communication.
Le latin est une langue secondaire que l’on apprends à l’école dans un but précis comme les oblats qui apprennent depuis l’enfance pour se destiner à une carrière d’homme d’Église. Le latin est considéré comme la langue sacrée parce que c’est la langue de la Bible. Mais la langue sacrée va petit à petit être ébranlée au XIIe siècle lorsque les langues vernaculaires passent à l’écrit dans le royaume de France comme la langue d’oc ou langue d’oïl.
La question de lire et écrire, universalisation de la langue latine
Savoir lire et écrire est indispensable pour les hommes d’Église. On peux le voir dans les monastères qui ont longtemps été chargé d’écrire les livres religieux. L’on a d’ailleurs lu dans le colophon du livre, les réflexions des moines vis-à-vis de cela, avec une grande fatigue physique sur toutes les heures de copies qu’ils font. Ils copient dans un lieu appelé le « Scriptorium« .
Lire et écrire sont des capacités dissociées, en l’époque l’on pouvait savoir écrire sans réellement comprendre ce que l’on écrivait puis inversement. Écrire est un art complexe, en effet, il faut blanchir les pages, les poncer, et utiliser des rasoirs ou canif pour rendre les peaux d’animales régulières.
Il y a longtemps eu deux blocs dans l’art de l’écriture et de la lecture comme nous l’explique l’histoire Armando Pétrucci qui a effectué des recherches sur le sujet. D’un côté, les hommes d’Église, tel que les moines, et de l’autre côté les laïcs plongés dans une culture orale et vernaculaire. Mais Armando Pétrucci a montré que cela était beaucoup plus complexe, avec des hommes d’Église très peu cultivés pour certains et des laïcs et « plurima litterata » très cultivés et spécialiste de la langue latine.
Le rôle des livres et l’émergence des premières bibliothèques
On passe du monopole de l’écriture détenu par les monastères et hommes l’Église vers une multiplicité de centres d’écritures dès le XIIIe siècle, l’Église n’a plus l’hégémonie de l’écriture. Cela entraîne une perte de domination de l’Église sur les laïcs qui commencent à eux aussi devenir acteurs des productions écrite usuelles. Puis en parallèle, l’essor des lieux d’instructions, de formations accentue la perte de pouvoir des hommes d’Église.
Malgré cela, les monastères gardent un rôle important dans l’éducation des laïcs et religieux. De cela va naître un débat interne dans la population des moines et hommes d’Église, entre le monachisme de culte et le monachisme de culture. En effet, d’un côte, les moines qui souhaitent transmettre leurs apprentissages religieux en formant les différentes personnes, avec toute la dimension de transmission de connaissances, c’est le monachisme de culture, et d’un autre côté, le monachisme de culte où les moines veulent être le plus proche de la pratique religieuse, en ce consacrant totalement à la prière et leurs activités fondamentale. Cela a fait émerger de nombreux conciles et réformes durant le Moyen Âge central pour rapprocher les moines de leur but principal, être dévoués entièrement à Dieu.
On doit aux moines les premières bibliothèques, dès le Haut Moyen Âge, au VIe siècle Benoît fonde un monastère qu’il dote d’une règle, celle de Saint Benoît. En effet entre 520 et 540, il se retire puis organise une petite communauté de religieux mais pour le vivre ensemble, il crée une règle, celle de Saint Benoît qui est connu de tous les religieux et hommes d’Église par la suite.
Ces règles sont importantes parce qu’elles imposent de lire un livre durant le carême, ce qui à donné naissance à une des premières bibliothèque. De plus, des règles de lecture communautaires, publiques et personnelles ont été mis en place. Avec l’émergence et le développement des bibliothèques, un nouveau métier émerge.
Celui du bibliothécaire appelé « armarius« , puisqu’il gardait la clé de l’armoire dans le scriptorium où était rangé les livres. Lire et écrire deviennent alors de véritable enjeux dans la société.
L’exemple de la bibliothèque du Vivarium construite en 564, montre bien l’évolution des bibliothèques pour en venir jusqu’aux bibliothèques que nous connaissons aujourd’hui. En effet, au départ les bibliothèques sont seulement un lieu de conservation des livres mais cela va évoluer pour devenir en plus un lieu de travail intellectuel et de production des livres.
Les débats constants dû au monopole de la langue par les moines
Depuis le haut Moyen Âge, il y a deux manières de vivre lorsque l’on est moine, celle du cénobitisme qui sont les moines qui vivent en communauté et celle de l’ermite qui vivent seuls. Mais entre le XIe et le XIIe siècle, il y a du renouveau chez les moines avec de nouveaux ordres qui émergent tels que les chartreux, les prémontrés ou les cisterciens. Ces ordres nouveaux accordent une importance à la branche principale de la religion et ont donc accordé une importance particulière aux bibliothèques. On voit alors une multiplication importante des bibliothèques. Il faut penser aussi que les personnes donnent des livres aux monastères pour s’assurer leurs saluts, pour avoir plus de prières des moines qui représentent les « meilleurs religieux ».
Puis après il va y avoir d’autres établissement religieux qui vont avoir des bibliothèques, comme les cathédrales, siège de l’évêque (dit séculier) accompagner par ses chanoines (qui sont séculiers aussi). Les chapelles aussi, puis les hôpitaux. Une autre étape importante avec la naissance des universités, qui ont un besoin évident et immédiat de livres. Puis les collèges, au XIIIe siècle nés, qui est un lieu pour abriter des étudiants pauvres, le premier est le Sorbon qui donne par la suite l’université mondialement connue la Sorbonne.
L’apparition de nouveaux ordres religieux, avec les ordres « mendiants » qui doivent vivre de l’aumône et sont itinérant, on parle de religieux ou de frère, parce que l’on dit que les monastères ont une certaine stabilité. Les Dominicains et les Franciscains sont les plus connus des mendiants. Eux aussi dès leurs fondations ont une mission pastorale pour mieux instruire et s’instruire, puis ont même une activité missionnaire. Ces deux objectifs requièrent des livres. Même les frères d’un genre nouveau correspondent avec le genre nouveau de l’Église, mais comme ils sont souvent en voyage ils ont des bibles portatives.
Quelques liens et sources utiles
Armando Petrucci « Promenades au pays de l’écriture », 1995, l’Histoire
Traduit par Germain Morin et Philibert Schmitz, La règle de Saint Benoît, entre 520 et 540, RSPB