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L’entrée déterminante de la France dans le conflit américain

La victoire américaine à Saratoga fin 1777 renverse la balance et encourage la France à rentrer en guerre aux côtés des colonies américaines.
Combat d'Ouessant, 23 juillet 1778, Theodore Gudin, 1839-Domaine Public
Combat d’Ouessant, 23 juillet 1778, Theodore Gudin, 1839-Domaine Public

Depuis 1775, les colonies américaines sont en guerre avec l’Angleterre. Au début du conflit, les Britanniques prennent rapidement le dessus grâce à son armée de métier, face à des troupes américaines très peu formées dans les premières campagnes comme au Canada et à New York.

Mais en octobre 1777, la victoire américaine à Saratoga renverse la balance et encourage la France à rentrer en guerre aux côtés des colonies américaines. Ce ralliement va s’avérer déterminant et faire basculer définitivement l’issue de la guerre.

Le traité d’amitié franco-américain

Depuis de nombreux mois de l’année 1777, la France approvisionne secrètement les Américains. Elle assure d’un côté le ravitaillement des troupes et d’un autre côté les transports des ambassadeurs américains afin de procéder à des négociations. Mais l’Angleterre est au courant de ces manœuvres et surveille les mouvements français. Par conséquent, les violations des territoires français ou bien les interceptions de navires sont courantes.

Ainsi au mois de décembre 1777, le navire français la Belle Poule transportant secrètement Silas Deane, un représentant américain est intercepté par une flotte britannique et manque de se faire fouiller quand les officiers français déclarent :

« Je suis la Belle Poule, frégate du Roi de France ; je viens de la mer et je vais à la mer. Les bâtiments du Roi, mon maître, ne se laissent jamais visiter. »

Le navire n’est ainsi pas fouillé et atteint l’Amérique sans encombre.

Le 6 février 1778, convaincue par la victoire américaine à Saratoga et après de multiples négociations, un traité d’amitié, de commerce mais également d’alliance est ratifié entre la France et les colonies américaines.

Portrait de Benjamin Franklin, 1767 - David Martin | Domain public
Portrait de Benjamin Franklin, 1767 – David Martin | Domain public

Louis XVI s’engage ainsi à permettre la liberté, la souveraineté et l’indépendance des Treize Colonies. Cette déclaration est remise à la Cour de Londres le 13 mars.

Le 20 mars 1778, Benjamin Franklin, alors représentant du Congrès américain est officiellement reçu par le roi de France pour rendre publique l’alliance entre les deux pays.

Les premiers accrochages navals entre Français et Britanniques

Après avoir rompu ses relations avec la France le 17 mars, l’Angleterre prend de son côté de nombreuses mesures vis-à-vis du nouvel ennemi. Les navires français présents dans les ports anglais sont ainsi immédiatement saisis et tout bâtiment français aperçu en mer est attaqué, comme la navire marchand français l’Oracle capturé dès le 27 mars

Toutefois début juin, les Anglais tentent de retourner une dernière fois la situation dans les Colonies en proposant au Congrès américain un accommodement qui permettrait la réunion des deux nations. Mais cette proposition est rejetée par les Américains et aucune négociation n’aboutit malgré les multiples relances anglaises.

La France procède à ce moment à l’armement de tous ses navires et lance également la construction d’un bon nombre de bâtiments de guerre. La même chose est faite à Londres et les navires anglais sont chargés de surveiller les côtes françaises pour éviter tout départ d’une flotte à destination de l’Amérique.

De ce fait, en juin 1778, le navire anglais l’Arethusa ouvre le feu sur le navire français la Belle Poule revenant d’Amérique, face au refus des Français de parler à leur commandant. Le navire français, bien qu’en sous nombre, s’en sort et le roi de France outré par l’agression de sa flotte déclare ouvertement la guerre à l’Angleterre.  

L’arrivée perturbée de la France en Amérique

Dès le mois d’avril 1778, Louis XVI ordonne à une partie de sa flotte d’embarquer pour l’Amérique.

Ainsi, le 13 avril 1778, 16 navires commandés par l’amiral d’Estaing transportant 8 000 hommes quittent Toulon et apprennent en lisant les ordres en pleine mer qu’ils se rendent en Amérique. Les Français arrivent le 8 juillet 1778 en baie de New York mais la flotte ne peut malheureusement assiéger la ville détenue par les Anglais depuis le 12 septembre 1776, sujet évoqué dans l’article : L’escalade du conflit américain : de Boston à Saratoga (1775-1777).

En effet, certains vaisseaux français tirent trop d’eau et risquent alors de toucher le fond puis de sombrer. La flotte française prend donc le large le 10 août et s’apprête à affronter la flotte anglaise de l’amiral Howe quand une tempête se déclenche la nuit du 11 et 12 août et force à les Français à se retirer à Boston, alors aux mains des alliés américains.

La flotte française ne peut ainsi soutenir les forces américaines qui assiègent Rhode-Island. La Royal Navy, seule sur place, soutient ardemment les forces britanniques. Elle bombarde alors les troupes américaines qui tentent de rentrer dans la ville et entraine leur retraite.

À ce moment le 27 juillet 1778, une autre flotte française commandée par l’amiral d’Orvilliers et composée de 29 bâtiments quitte Brest à destination de l’Amérique. Mais à peine au large des côtes françaises, elle rencontre les 30 bâtiments de la flotte anglaise de l’amiral Keppel qui cherche à l’empêcher d’atteindre sa destination occidentale.

Les navires s’observent et après plusieurs heures de manœuvres, le combat s’engage au large de l’île d’Ouessant. Les dégâts sont faibles et les victimes peu importantes par rapport aux forces en présence. On dénombre en effet une centaine de morts côté français contre près de 4 fois plus côté anglais. Chaque camp se pensant victorieux rebrousse chemin vers son port d’attache.

La France et l’Angleterre dans la guerre des Antilles

Les Antilles constituent un point d’attache stratégique vis-à-vis du théâtre de guerre américain. Ces diverses îles font ainsi l’objet de convoitises de la part des deux camps et plusieurs batailles s’y déroulent.

Le 6 septembre 1778, les Français prennent en quelques heures et sans résistance l’île de la Dominique (qu’ils détenaient d’ailleurs avant la guerre de Sept Ans) avec une flotte de 1800 hommes commandée par le marquis de Bouillé.

L'action de Barrington à Sainte-Lucie, 1780 - Dominic Serres | Domaine Public
L’action de Barrington à Sainte-Lucie, 1780 – Dominic Serres | Domaine Public

Le 14 septembre 1778, les Anglais s’empressent de riposter et attaquent les îles françaises de Saint-Pierre et Miquelon qu’ils annexent et rasent entièrement, renvoyant tous ses habitants français en Europe.

Les Anglais commandés par l’amiral Barrington prennent également l’île française de Sainte-Lucie mi-décembre 1778 avec 4000 hommes et font monter des batteries sur les fortifications. La flotte française de l’amiral D’Estaing, partie de Boston le 4 novembre 1778, tente de reprendre l’île fin décembre par la voie terrestre mais échoue malgré sa supériorité numérique et retourne en Martinique. Cette prise anglaise devient un point stratégique de la présence britannique aux Antilles, les mettant à proximité des voies de navigation des Français.

Mais la guerre dans les colonies américaines se répercute également de l’autre côté du globe. Ainsi en Inde orientale, les Anglais attaquent les comptoirs français. Entre octobre 1778 et mars 1779, Pondichéry, Chandernagor, les comptoirs du Bengale et ceux de la côte de Coromandel et de Malabar sont capturés par les Anglais qui évincent définitivement la présence française en Inde.

Aux Caraïbes, l’île de Saint-Vincent est prise par les Français début juillet 1779 avec les 1500 hommes du comte d’Estaing. La capture de l’île est rapide et permet la saisie de 30 navires marchands. La flotte anglaise de l’amiral Byron arrive au large de l’île quelques heures après et tente de la reprendre. Un combat s’engage alors pendant plusieurs heures et mène la victoire de la flotte française.

Le revirement de la guerre d’Indépendance

Le 12 avril 1779, l’Espagne, exaspérée de voir son territoire louisianais (thème évoqué dans l’article : La Louisiane un héritage français en Amérique) et sa flotte sujets à de nombreuses violations entre en guerre aux côtés de la France avec le traité d’Aranjuez. Les Français esquissent alors dès juin 1779 un projet d’invasion de l’Angleterre avec leurs alliés espagnols. Une armée composée de 35 000 hommes et 300 bâtiments est alors formée. Cette attaque est en réalité destinée à détourner les Anglais de la guerre en Amérique.

Ainsi le 17 août suivant, une flotte de 66 navires combinée des bâtiments français et espagnols s’apprête à attaquer l’Angleterre. Mais après plus de cent jours passés en mer, la maladie et une tempête début septembre anéantissent les forces françaises causant près de 5000 morts. Les Français sont ainsi forcés de rentrer à Brest et l’expédition est annulée.

De l’autre côté de l’Atlantique, la flotte française de l’amiral d’Estaing part à la mi-août 1779 des Antilles en direction de la Géorgie où les Anglais ont remporté de nombreuses batailles et évincé les Américains de la région. Les Français se dirigent vers la ville portuaire de Savannah, détenue depuis peu par les Anglais. La flotte française veut venir en aide aux troupes américaines qui veulent faire le siège de la ville au mois de septembre.

De son côté, l’Espagne tout juste rentrée en guerre contre l’Angleterre va permettre l’établissement d’une nouvelle ligne de front en Amérique dans la province de la Floride occidentale qui est frontalière avec la Louisiane espagnole et donne un accès stratégique sur la vallée du Mississipi.

L’Angleterre s’apprête ainsi à se retrouver seule à combattre sur tous les fronts et des événements successifs vont la conduire progressivement à être défaite à la bataille de Yorktown en octobre 1781, marquant la perte définitive de ses possessions américaines.

Quelques liens et sources utiles

Odet Julien Le Boucher, Histoire de la guerre de l’indépendance des Etats-Unis Tome 1, Hachette Livre BNF, 2012

Pascal Cyr et Sophie Muffat, La guerre d’indépendance américaine, PASSES COMPOSES, 2022

Edmond Dziembowski, La guerre de Sept Ans, Tempus Perrin, 2018

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