Ce dimanche 5 novembre, le journaliste philippin Juan Jumalon est tué par balle à son domicile. Une énième exaction qui fragilise l’écosystème informationnel philippin, compromis depuis des décennies.
Depuis son home studio soigneusement aménagé sur l’île de Mindanao, Juan Jumalon animait la page Facebook 94.7 Gold Mega Calamba FM, aux quelque 2.400 abonnés.
Ce dimanche 5 novembre, à 5h35, il est abattu par un homme armé, selon Deore Ragonio, chef de la police de Calamba dans la province de Misamis-Occidental (nord-ouest de l’île). Prétextant qu’il souhaitait faire une annonce à l’antenne, le suspect s’est introduit dans la cabine d’enregistrement avant de tirer à deux reprises sur le journaliste. Une attaque filmée lors de la diffusion en direct de son émission.
Selon Cebu Daily News, une enquête en cours vise à désigner l’auteur du crime. Dans un communiqué rapporté par le site philippin Rappler, le président Ferdinand Marcos Jr promet que justice sera faite.
Il traitait principalement de l’actualité et n’était pas connu pour avoir critiqué qui que ce soit dans ses émissions […] Des attaques aussi odieuses contre nos journalistes n’ont pas leur place dans une nation démocratique.
Deore Ragonia, chef de la police de Calamba, province de Misamis-Occidental.
Informer aux Philippines : un dangereux exercice
Bien qu’aucun mobile ne soit connu pour l’heure, le syndicat national des journalistes (NUJP) n’exclut pas un lien avec les élections locales du 30 octobre. En effet, plusieurs affrontements ont été rapportés et une multitude de journalistes locaux dénoncent un flot de menaces de la part de politiques à la suite de leur couverture des élections.
De sinistres conditions de travail que constate conjointement Reporters Sans Frontières, affirmant que « les Philippines sont l’un des pays les plus meurtriers au monde pour les journalistes ».
En effet, comme le rappelle Jonathan De Santos, président du NUJP, le meurtre du journaliste Juan Jumalon vient s’additionner à une longue liste de 198 journalistes disparus depuis la restauration de la démocratie en 1986.
Au total, ils sont quatre professionnels à avoir été assassinés depuis le début, en juin 2022, de la présidence de Ferdinand Marcos Jr. L’élection dudit « Bongbong » a laissé une grande part des journalistes philippins dans l’expectative, puisqu’il est précédé par la réputation de son père, l’ancien dictateur Marcos Senior – prédateur historique de la liberté de la presse dans le pays.
Quelques liens et sources utiles
RESSA Maria, Résistez aux dictateurs, Fayard, 2023.
Reporters Sans Frontières, Philippines, consulté le 6 novembre 2023.