Hélène Boucher est une pilote française du XXème siècle. Découvrant l’aviation grâce à un ami, elle passe son brevet de pilote professionnelle en 1932 et s’attaque rapidement à la conquête de plusieurs records qui feront d’elle l’une des avant-gardistes de l’aviation féminine.
Une enfance dans un milieu aisé
Hélène Boucher est née le 23 mai 1908 à Paris. La famille Boucher est issue d’un milieu bourgeois. En effet le père Léon, ancien élève des Beaux-Arts, est architecte à Paris dans le quartier Montparnasse où la famille habite.
Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, les Boucher quittent Paris pour leur maison familiale à Yermenonville, non loin de Chartres. Hélène découvre la vie à la campagne où elle aime conduire les vaches au champ et dessiner les animaux. Elle se révèle également douée au piano. Mais depuis qu’elle a vu un avion se poser dans un champ pendant la guerre, elle se passionne pour les engins motorisés. C’est ainsi qu’elle emprunte sans permission la voiture de ses parents ou la moto de son frère aîné.
À l’âge de 18 ans, elle refuse de passer le bac et est envoyée 3 mois en Angleterre dans une pension où elle a l’occasion de pratiquer de nombreux sports comme l’escrime, le tennis, la gymnastique. À son retour, elle tente de gagner de l’argent dans le milieu de la mode en dessinant des chapeaux pour une boutique.
Suite à la proposition d’un ami pilote, elle passe son baptême de l’air à Orly le 4 juillet 1930, à l’âge de 22 ans. Elle a enfin trouvé sa vocation et veut devenir aviatrice, malgré les avertissements de ses proches qui connaissent les dangers de cette nouvelle profession.
Fréquentant régulièrement l’aérodrome pour accompagner des vols, elle y rencontre l’industriel Henri Fabros, président de l’aéroclub de Mont-de-Marsan. Ce dernier lui propose de s’inscrire à son club pour passer le brevet. Hélène accepte immédiatement et déménage à Mont-de-Marsan en mars 1931.
Elle devient l’élève de Henri Liaudet, moniteur de l’aéroclub des Landes et passe son brevet de pilote de tourisme le 21 juin avec succès. Mais ce diplôme ne lui permet pas de vivre de sa nouvelle passion. Hélène veut ainsi briguer le brevet de pilote professionnel de transport public et achète pour cela un avion d’occasion (le Gipsy Moth) en empruntant de l’argent à son entourage. Elle doit cumuler avec l’appareil 100 heures de vol et réaliser un vol de nuit. Elle fait cela en juin 1932 et devient ainsi la quatrième femme en France à le décrocher après Adrienne Bolland, Maryse Bastié et Maryse Hilsz.
Des débuts décevants pour la jeune aviatrice
Son objectif est désormais clair : battre des records et réaliser des voyages à travers le monde.
Elle achète un nouvel avion, le Avro Avian, avion britannique détenteur de plusieurs records et techniquement adapté à ces objectifs. Sa première course aérienne a lieu en juillet 1932 : Hélène doit relier Cannes-Deauville le plus vite possible. Mais au milieu de la course, la jeune femme rencontre un problème mécanique et son avion atterrit en catastrophe. La pilote va bien mais l’abandon est inévitable.
Après de nombreux entraînements, elle décide d’accomplir un raid vers l’Extrême Orient en reliant Paris à Saïgon, capitale de l’Indochine française. Ce trajet de 12 000 km devra être ponctué par de nombreux arrêts car son avion a seulement 640 km d’autonomie. Après une première tentative le 6 février 1933, l’aviatrice décolle le 13 février, et suit le trajet Auxerre-Cannes-Pise-Naples-Athènes-Alep. Des problèmes moteurs l’obligent à se poser en Irak, sur une piste en plein milieu du désert avant Bagdad. Après plusieurs semaines de réparation, l’aviatrice ne souhaite pas poursuivre vers Saïgon et repart vers Le Bourget via la côte nord-africaine.
À la déception de ce voyage s’ajoute l’endettement de la jeune femme qui n’a pas terminé de payer cet avion qu’elle ne pilotera plus. Cependant, Hélène s’est attiré l’attention des médias et des constructeurs qui commencent à parler d’elle.
Hélène cherche dès lors un nouvel avion qu’elle pourrait piloter sans frais. C’est ainsi qu’elle se voit proposer par le constructeur Mauboussin de participer aux 12h d’Angers. Cette course renommée consiste à parcourir en duo la plus grande distance et se découpe en une série de 3 épreuves de 4 heures.
Le dimanche 2 juillet 1933, Hélène parcourt 1646 km et termine cette épreuve à la quatorzième place. Les vainqueurs Langlois et Burtin gagnent en ayant parcouru 2463 km. Bien que déçue, Hélène se fait remarquer par le pilote de voltige Michel Détroyat qui la félicite.
Une ascension rapide via la conquête de records et la voltige
Le 2 août 1933, Hélène Boucher établit son premier record : le record du monde féminin d’altitude sur avion léger à 5900m en battant l’américaine May Haizlip dont le record s’établissait à 5516 m.
Michel Détroyat lui propose de la former à la voltige dans le but de participer en duo à des compétitions. Hélène accepte immédiatement et est formée en à peine quelques semaines. Détroyat voit son élève comme une prodige et déclare :
« Dans quelques mois, elle sera la meilleure acrobate du monde ! »
Vient le jour de la première compétition où le duo affronte à Villacoublay le 8 octobre 1933 l’as de guerre Allemand Fiesler et la championne de voltige Vera von Bissing. Les pilotes enchaînent alors les vrilles et tonneaux devant des milliers de spectateurs. C’est au tour d’Hélène qui offre une prestation épatante malgré son inexpérience. Les résultats tombent : pour le duel hommes, Detroyat bat le pilote allemand. Pour les femmes, Hélène et Vera ne pourront être départagées.
Une carrière s’ouvre pour Hélène qui enchaîne les exhibitions dans les meetings aériens à travers toute la France. Mais les courses lui manquent et l’aviatrice a toujours en tête les records de vitesse à battre.
En juin 1934, elle est engagée comme salariée par Renault qui lui fournit un Caudron.
La jeune pilote finit 2ème aux 12h d’Angers pour
sa seconde participation, en effectuant la course sans aucun relais contrairement au duo de vainqueurs Lacombe et Trivier.
Elle bat également le record de vitesse sur 1000km avec un avion léger à la vitesse de 250km/h.
L’aviatrice s’attaque au record de vitesse en août 1934 à bord d’un Caudron 450, bolide de 330 CV. Le 8 août, elle obtient le record international de vitesse toutes catégories sur 1000km à 409km/h et le record international féminin sur 100 km à 412 km/h, surclassant l’Américaine Amelia Earhardt avec ses 275km/h.
Puis le 10 août, elle obtient le record du monde féminin de vitesse à 428 km/h appartenant jusqu’alors à May Haizlip. Insatisfaite de sa performance, Hélène réessaye le lendemain et porte le record à 445 km/h. La jeune femme fait alors la une des médias : celle qu’on surnomme la pilote la plus rapide du monde est à l’apogée de sa carrière.
Pour Renault, elle continue de participer à de nombreuses démonstrations aériennes. Ses parents sont bien conscients des dangers du métier et lui demandent d’arrêter. Mais Hélène refuse en leur assurant qu’elle maîtrise les risques. En réalité, elle sait qu’elle mourra de sa passion et l’a confié à son amie d’enfance Dolly.
La fin tragique tant redoutée de l’aviatrice
Le 30 novembre 1934, malgré de mauvaises conditions météo et l’avertissement de plusieurs pilotes, Hélène quitte le Salon de l’Aviation à Paris auquel elle participait afin d’aller s’entraîner sur l’aérodrome de Guyancourt. Elle doit en effet piloter le Caudron C.430 Rafale pour une démonstration ayant lieu le surlendemain au Salon.
Aux commandes de l’appareil, l’aviatrice effectue plusieurs tours au-dessus de l’aérodrome. Mais la visibilité se détériore et la pilote tente d’atterrir une première fois. Elle se rend compte qu’elle arrive à trop grande vitesse et effectue une remise de gaz. La jeune femme s’approche une seconde fois de la piste en survolant la forêt attenante à très basse altitude mais s’aperçoit trop tardivement que sa vitesse est trop faible et qu’elle n’atteindra pas la piste. C’est alors qu’en essayant de remettre les gaz, son avion bascule et touche plusieurs arbres avant de s’écraser au lieu dit « La Croix du Bois ».
Sortie inconsciente de l’avion, elle meurt au cours du trajet l’amenant à l’hôpital de Versailles. Elle avait 26 ans.
La stupeur est totale et les journaux relaient dans toute la France la terrible nouvelle.
Le 2 décembre, un hommage national est organisé aux Invalides (le 1er pour une femme) où tout le monde de l’aviation est présent dont ses amis : Michel Détroyat, Maryse Bastié ou encore Maryse Hilz. Hélène Boucher est enterrée quelques jours plus tard à Yermenonville près du domaine familial où une foule considérable assiste à ses obsèques.
La légende de l’aviation féminine reçoit la Légion d’honneur à titre posthume et est citée à l’ordre de la Nation.
Quelques liens et sources utiles
Bernard Marck, Elles ont conquis le ciel : 100 femmes qui ont fait l’histoire de l’aviation et de l’espace, Arthaud, 2009
Revue trimestrielle des Vieilles tiges, Pionniers 1984
Francis Berger, La belle époque de l’aviation, Editions Sutton, 2005
Evelyne Morin-Rotureau, Hélène Boucher, PEMF, 2005
Antoine Redier, Hélène Boucher, jeune fille française, Flammarion, 1935