Situé au Nord de la ville de Buenos Aires, le long du Rio de la Plata, le Parque de la memoria est incontournable pour quiconque souhaite réaliser l’ampleur des crimes commis pendant la dernière dictature militaire.
Premier site de mémoire argentin, il rend hommage aux victimes du terrorisme d’état des “années de plombs” en mêlant art, politique et mémoire.
La construction du Parque de la memoria
Né à la demande des organisations de défense des droits de l’homme dans un contexte hostile aux politiques de mémoire, le Parque de la memoria s’étend sur 14 hectares. Sa création représente un acte de résistance face à l’impossibilité de poursuivre en justice les responsables des atrocités de la dictature, quelques années seulement après les lois d’amnistie et de pardon des années 1990.
Pensé comme un espace public multiforme, il réunit les valeurs culturelles, touristiques, éducatives et testimoniales. L’approbation de sa construction par le conseil municipal de Buenos Aires, à 57 votes sur 60, remonte au mois de juillet 1998 avec la promulgation de la loi 46.
Le projet se voit alors porté par un concours organisé par la faculté d’architecture de la capitale. Sa conception cherche à respecter l’environnement et à trouver l’équilibre entre ville et nature. Inauguré le 30 août 2001, la date choisie coïncide avec la journée internationale des disparus. En novembre 2007, le Monument aux victimes de la dictature voit le jour dans le Parque de la memoria. Composé de quatre stèles en béton, il recueille 30 000 plaques en souvenir des 30 000 morts et disparus.
Initialement le projet a été administré selon un modèle de gestion mixte unique et innovant : la Commission des monuments, composée de représentants de dix organisations de défense des droits de l’homme, de onze législateurs, de quatre fonctionnaires municipaux (Droits de l’homme, Culture, Éducation, Espace Public et Environnement) et d’un représentant de l’Université de Buenos Aires, qui a cédé une partie du terrain pour la construction du Parc de la Mémoire.
En 2009, le parc obtient un cadre juridique permanent. La Commission des monuments est remplacée par un conseil de gestion autonome, composé de membres d’organisations de défense des droits de l’homme et de la municipalité, perpétuant ainsi la gestion mixte.
Déclaré monument historique national le 9 juin 2014, le Parque de la memoria est conçue comme une coupure dans le paysage, une plaie ouverte dans une colline sans aucun élément autour, représentant ainsi la blessure irrémédiable faite à la société et au pays.
Un haut lieu de mémoire
L’emplacement du Parque de la memoria a été méticuleusement choisi après les révélations du capitaine Adolfo Scilingo, un militaire qui a décrit les sinistres « vols de la mort » consistant à larguer des prisonniers vivants dans la mer. Le site, proche du Rio de la Plata, est un témoignage de ces victimes. Ce parc rend hommage aux milliers de victimes mortes ou disparues pendant la dictature militaire argentine, inscrivant leurs noms lorsque c’est possible sur le Monument aux disparus pour garantir que leur mémoire ne soit pas oubliée. Il se veut un lieu de réflexion et de sensibilisation pour les nouvelles générations, visant à éviter que de telles horreurs ne se reproduisent.
Chaque mois, entre 20 000 et 30 000 visiteurs, dont environ 2 000 à 4 000 élèves, visitent le parc. Ils viennent pour comprendre et se souvenir des atrocités passées, contribuant à la sensibilisation et à l’éducation sur les violations des droits de l’homme. Depuis 2012, le parc dispose d’une base de données de consultation publique qui retrace l’histoire de chaque disparu mentionné sur le monument, offrant des détails sur leur vie et, lorsque c’est possible, sur les circonstances de leur mort.
Le Parc de la Mémoire a aussi joué un rôle significatif en ouvrant le débat public et en permettant la représentation artistique de cette période sombre de l’histoire argentine. Il a reçu la visite de nombreux dirigeants étrangers, dont Angela Merkel, François Hollande et Barack Obama, soulignant son importance en tant que symbole de mémoire et de réconciliation internationale.
Un résultat en demi-teinte
Bien que la portée commémorative du Parque de la memoria soit indéniable, sa construction a pourtant fait l’objet de nombreuses critiques. D’une part, une frange de la population argentine lui reproche de commémorer et d’honorer certains “terroristes”, ayant attaqué, blessé ou tué des policiers dans l’exercice de leur fonction.
D’autre part, de l’autre côté du spectre politique, certaines organisations des droits de l’homme ou anciennes victimes reprochent eux l’hypocrisie des gouvernements. Pour ces derniers commémorer les victimes sans pour autant juger les responsables n’est que du démagogisme et constitue un calcul électoral plus qu’autre chose.
Quelques liens et sources utiles
Parque de la Memoria. Monumento a las Víctimas del Terrorismo de Estado. Agenda 21 Culture.
Parque de la Memoria. Parque.
Parque de la Memoria: Monumento a las Víctimas del Terrorismo de Estado. Comisión por la Memoria.