Le Pacte de Varsovie : une alliance stratégique au cœur de la Guerre froide

L'Union soviétique, souhaitant créer une zone de sécurité qui lui était propre, initia la création du Pacte de Varsovie.
M48 Patton de la Berlin Brigade américaine en face à face avec des T-55 du Groupement des forces armées soviétiques en Allemagne le 27 octobre 1961, durant la crise de Berlin - U.S. Army photo Photo | Domaine public
M48 Patton de la Berlin Brigade américaine en face à face avec des T-55 du Groupement des forces armées soviétiques en Allemagne le 27 octobre 1961, durant la crise de Berlin – U.S. Army photo Photo | Domaine public

Sommaire

Le Pacte de Varsovie fait référence au « Traité d’amitié, de coopération et d’assistance mutuelle », signé le 14 mai 1955 par huit États, en réaction à la création de l’Union d’Europe Occidentale (UEO) et à l’intégration de l’Allemagne de l’Ouest dans l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN).

Contrepoids idéologique et militaire à l’alliance atlantique, il a marqué l’histoire de la Guerre froide par sa dimension à la fois stratégique, politique et symbolique. 

Le contexte de la création du Pacte de Varsovie

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l’Europe se retrouve rapidement divisée par ce que Winston Churchill a nommé le “rideau de fer” dans son célèbre discours de Fulton du 5 mars 1946.

Emblème du Pacte de Varsovie - Dmitry Tretiakov | Domaine public
Emblème du Pacte de Varsovie – Dmitry Tretiakov | Domaine public

“[…] un rideau de fer est descendu à travers le continent. Derrière cette ligne se trouvent toutes les capitales des anciens États de l’Europe centrale et orientale.

Varsovie, Berlin, Prague, Vienne, Budapest, Belgrade, Bucarest et Sofia, toutes ces villes célèbres et les populations qui les entourent se trouvent dans ce que je dois appeler la sphère soviétique […].”

Face à ce climat de tensions, l’OTAN et l’Union d’Europe occidentale (UEO), fondés respectivement en 1949 et 1954, représentaient deux réponses collectives aux menaces perçues par les nations occidentales. En retour, l’Union soviétique, souhaitant créer une zone de sécurité qui lui était propre, initia la création du Pacte de Varsovie.

Signé le 14 mai 1955 à Varsovie, le traité réunissait initialement huit pays : l’Union soviétique, la Bulgarie, la Tchécoslovaquie, la République démocratique allemande, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie et l’Albanie (qui se retira en 1968).

Objectifs et structure du Pacte

Contrairement aux idées reçues, le traité de Varsovie ne comportait de références directes ni à l’idéologie socialiste, ni à la lutte des classes. Son objectif officiel était d’assurer la paix et la sécurité collective en Europe.

Ouvert, en principe, à tous les pays européens, indépendamment de leur régime social et politique, il s’agit de faire face à la menace de guerre perçue par l’URSS du fait de la ratification des Accords de Paris (1954), créant l’UEO et permettant la remilitarisation de la RFA dans le cadre du commandement intégré de l’OTAN.

Ainsi, le Traité de Varsovie apparaît comme une réponse tardive au Traité de l’Atlantique nord, prenant en compte les évolutions de la situation stratégique en Europe, ce qui se traduit par d’importantes similitudes entre les deux traités. Toutefois, le cœur de l’alliance militaire dirigée par l’URSS n’est pas tant le Pacte de Varsovie que les différents traités bilatéraux avec les pays du bloc socialiste. En effet, celui-ci vient compléter une série d’accords instaurant les principes de « solidarité socialiste » et d’automaticité de l’engagement militaire.

Par exemple, le traité entre l’URSS et la Roumanie (4 février 1948) mentionne qu’en cas d’agression de l’Allemagne ou d’un de ces alliés, l’autre partie devrait prêter « immédiatement son aide militaire, ou de toute autre nature, par tous les moyens dont elle disposera, à la Partie Contractante entraînée dans le conflit.

L’architecture du Traité de Varsovie reposait sur deux structures principales :

  1. Le Comité de consultation politique, chargé des discussions stratégiques et diplomatiques
  2. Le Commandement unifié des forces armées

Ces structures ont permis une meilleure intégration des forces armées, et une meilleure efficacité opérationnelle comparativement au Traité de l’Atlantique Nord du fait de la standardisation des armements, des équipements, des concepts et des méthodes d’instruction.

Tensions et limites internes

Bien que le Pacte de Varsovie se présentait comme une alliance de défense collective, il n’était pas exempt de tensions internes. À plusieurs reprises, des membres de l’organisation ont cherché à s’émanciper de la tutelle soviétique afin de gagner en autonomie, tant dans leur politique de défense, que dans leur modèle économique et social. Néanmoins, à l’exception de l’Albanie, ces tentatives se sont soldées par des échecs.

Deux évènements majeurs illustrèrent ces fractures :

Un char soviétique tente de dégager une barricade routière à Budapest, en Hongrie (1956). - CIA | Domaine public
Un char soviétique tente de dégager une barricade routière à Budapest, en Hongrie (1956). – CIA | Domaine public
  • Le Printemps de Prague en 1968 : l’URSS et plusieurs pays alliés du Pacte entrèrent en Tchécoslovaquie afin de réprimer les réformes libérales engagées par Alexander Dubček.

Lors de l'invasion soviétique en Tchécoslovaquie (1968) - CIA | Domaine public
Lors de l’invasion soviétique en Tchécoslovaquie (1968) – CIA | Domaine public

Ces interventions militaires soulignent les limites de la coopération et les contradictions existantes entre l’idéal d’une alliance égalitaire et la réalité de la mainmise soviétique. Ces contestations menèrent à un rôle croissant du Traité de Varsovie en tant qu’outil politique et militaire, servant à maintenir les régimes communistes en place et à empêcher toute dérive réformiste dans le bloc de l’Est.

Après la dissolution : quel héritage ?

Avec la chute du mur de Berlin et l’effondrement des régimes communistes en Europe, le Pacte de Varsovie perdit sa raison d’être. La structure militaire fut démantelée en février 1991, avant la dissolution de la structure politique en juillet de la même année.

Le pacte a laissé une empreinte durable sur les relations internationales et la géopolitique européenne. La dissolution du bloc de l’Est a ouvert la voie à une redéfinition des alliances en Europe, avec l’intégration progressive de plusieurs anciens États membres du Pacte dans des structures occidentales telles que l’OTAN et l’Union européenne. Ce bouleversement symbolise non seulement la fin de la Guerre froide, mais aussi la fascination pour le modèle occidental, perçu comme prospère et protecteur.

Quelques liens et sources utiles

Traité d’amitié, de coopération et d’assistance mutuelle (Varsovie, 14 mai 1955). CVCE.EU by UNI.LU. La Documentation française, Document – Traité d’amitié, de coopération et d’assistance mutuelle. Consulté le 15 février 2025.

Paris, Henri. « Chapitre II. Le pacte de Varsovie en puissance et l’internationalisme ». Stratégie soviétique et chute du pacte de Varsovie, Éditions de la Sorbonne, 1997

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