L'ouvrage coup de cœur d'avril : Petit dictionnaire des Sales Boulots par Nicolas Méra

L’abolition de l’esclavage aux États-Unis 18 décembre 1865

Les révolutions et la guerre d'Indépendance entrainent la libération des esclaves dans les États nouvellement créés des États-Unis.
Vente aux enchères d'esclaves en Virginie, le 2 juin 1861 - Womenofcolor (pseudo Wikipédia) | Creative Commons BY-SA 4.0
Vente aux enchères d’esclaves en Virginie, le 2 juin 1861 – Womenofcolor (pseudo Wikipédia) | Creative Commons BY-SA 4.0

Les États-Unis, terre de promesses pour les pauvres et les persécutés d’Europe, sont devenus un bastion du commerce mondial dans la seconde moitié du XIXe siècle. De la production massive de coton et de tabac pour satisfaire l’appétit grandissant des Européens, à l’exploitation inhumaine de la traite négrière pour répondre à la demande croissante de main-d’œuvre, l’économie américaine a prospéré sur des fondations sinistres.

Tout cela a changé le 18 décembre 1865 avec l’abolition de l’esclavage, marquant un tournant dans l’histoire des États-Unis. Plongez dans cet article pour en savoir plus.

Les cas de Frederick Douglass et de Billy McCrea

L’Amérique devient une terre d’accueil pour les populations pauvres, discriminées, persécutées de l’Europe. Dans un premier temps zone d’exclusion, l’Amérique devient le centre d’un important trafic commercial. Le coton, le tabac sont des denrées produites en très grand nombre sur le Nouveau Continent pour répondre à la demande toujours plus forte des Européens.

Un commerce s’installe en parallèle, la traite négrière qui permet de répondre à la demande toujours plus forte de main-d’œuvre. Dans les Treize colonies britanniques d’Amérique du Nord, ce système existe également et permet de faire fructifier l’économie nouvelle de ce territoire.

Une jeune nation en besoin de main-d’œuvre

« Dès les premiers temps de la colonisation, l’Amérique dépendit largement du travail forcé et au début du XVIIIe siècle, l’esclavage était devenu le principal système de travail dans les colonies du Sud, tout en étant légal ailleurs. » 

Peter Kolchin

Les moteurs de l’esclavagisme en Amérique sont le tabac et le coton, qui nécessitent une importante main d’œuvre. En effet, ce sont des produits extrêmement demandés en Europe.

Le coton par exemple sert à fournir les usines britanniques de Manchester. Les indentured (travailleurs sous contrat) et les engagistes qui composent normalement la main d’œuvre américaine ne permettent plus de combler la demande.

Vers une fin de l’esclavage dès la guerre révolutionnaire

La question de l’esclavage est évoquée bien avant la guerre de Sécession et bien avant la guerre d’Indépendance américaine. En effet, les grands penseurs de l’époque souhaitent mettre un terme à l’esclavage.

La question devient primordiale lors de la guerre révolutionnaire de 1775 à 1783. Les Américains comme les Anglais promettent la liberté des esclavages qui s’engageraient dans leur camp. Les révolutions et la guerre d’Indépendance entrainent la libération des esclaves dans les États nouvellement créés des États-Unis d’Amérique.

Le dernier État du nord à abolir partiellement l’esclavage est le New Jersey en 1804. Aux alentours de 1810, quasiment les trois quarts des noirs étaient libres dans les États du Nord et la totalité dans les années 1840. La traite fut quant à elle abolie en 1807, l’arrivée de nouveaux esclaves est donc maintenant impossible sur le territoire américain.

Européen examinant des esclaves au marché aux esclaves de Rio de Janeiro (Brésil), avant 1857 - Edward Francis Finden | Creative Commons BY 4.0
Européen examinant des esclaves au marché aux esclaves de Rio de Janeiro (Brésil), avant 1857 – Edward Francis Finden | Creative Commons BY 4.0

Un clivage avec les États du Sud

Cependant malgré ses évolutions, les États du Sud nécessitaient toujours beaucoup de main-d’œuvre pour les plantations, l’utilisation de l’esclavage est toujours en cours dans les États du Sud, soulevant dès lors un clivage aux États-Unis. L’esclavage reste en vigueur notamment en Géorgie et en Caroline du Sud.

Ceci provoque des migrations des populations noires souvent esclaves du Sud vers le Nord, jusqu’à la fin de la guerre de Sécession et l’abolition officielle de l’esclavage aux États-Unis d’Amérique le 18 décembre 1865. L’abolition ne provoque pas un sentiment d’égalité entre blancs et noirs, en effet, se met en place la ségrégation.

Inégalité entre les noirs et les blancs

Les noirs sont privés de certains droits et ils sont encadrés. Les États du Sud marquent très fortement cette ségrégation. Certains groupes apparaissent comme le Ku-Klux-Klan, qui ont comme conviction des idéologies racistes. La ségrégation s’arrête officiellement dans le milieu du XXe siècle.

Ce changement de mentalité s’opère lors de la participation de régiment noir dans la Première Guerre mondiale. La situation reste précaire pour autant, encore aujourd’hui, malgré une amélioration toujours plus forte de leur condition.

Deux hommes victimes de l’esclavage et de la ségrégation

Les deux personnages que nous avons à étudier sont des figures importantes de l’esclavage et de la ségrégation aux États-Unis. En effet, ils ont tous les deux connu la période de l’esclavage.

L’histoire de Frederick Douglas

Le premier Frederick Augustus Washington Bailey (Frederick Douglas) naît soit en 1817 ou en 1818. Il est fils d’une esclave et d’un père blanc. Il est rapidement séparé de sa famille, et est élevé par sa grand-mère jusqu’à 8 ans. Il part ensuite travailler dans une plantation au Maryland où, il assiste à des scènes de violences. Il arrive par la suite à rejoindre Baltimore et devient servant pour la famille de Hugh Auld.

Il est renvoyé à l’âge de 16 ans dans une plantation. Il essaye rapidement de s’enfuir en direction du Nord et notamment de la ville de New York. C’est durant cet épisode qu’il choisi de s’appeler Douglass, afin d’échapper aux chasseurs d’esclaves.

Lors qu’il arrive enfin à être en sécurité, il se consacre aux mouvements abolitionnistes, à l’éducation des afro-américains et à l’émancipation des femmes. Il arrive en 1841 au Massachusetts, un État anti-esclavagistes. Ses talents d’orateurs sont rapidement reconnus, il devient agent pour la Massachussetts Anti-Slavery Society. 

Frederick Douglass se lance en 1845 dans la rédaction de sa biographie : La vie de Frederick Douglass, esclave américain, écrite par lui-même (en français). Cet ouvrage est destiné à la défense de la cause noire. Il permet de mettre en avant la vie des esclaves tout en illustrant Frederick Douglass comme ancien esclave face aux nombreuses critiques contemporaines qui ne le considèrent pas vraiment esclave au vu de son niveau de langues.

Nous en avons ici un extrait qui se penche sur un moment important de la vie de l’ancien esclave. Le texte raconte l’instant où M. Auld découvre que sa femme enseigne à Douglass de manière secrète, à lire et à écrire. Douglass rapporte les paroles du maître de maison, qui explique à sa femme, pourquoi il ne faut surtout pas éduquer un esclave.

L'histoire de l'esclavage aux États-Unis avec Frederick Douglass - Engraved by J.C. Buttre | Domaine public
L’histoire de l’esclavage aux États-Unis avec Frederick Douglass – Engraved by J.C. Buttre | Domaine public

L’histoire de Billy McCrea

Billy McCrea est un personnage plus complexe, il est difficile à situer, il ne connait pas sa date de naissance, aussi différents âges, lui sont attribués lors de l’interview, le plus jeune étant 89 ans. Ce qui signifie qu’il serait né en 1841.

Cette date lui laisserait le temps d’avoir été touché par les derniers années de l’esclavage aux États-Unis. Les chants sont un exemple de cette culture d’esclave. Il était cuisinier sur un bateau à vapeur.

McCrea est connu grâce à l’interview qu’il a réalisé avec John et Ruby Lomax en 1940. Ce couple forme une sorte de groupe de recherche lancé initialement par John. Il est diplômé en littérature à Harvard, il y enseigne quelque temps. Il engage au début du XXe siècle une recherche et une collecte de chansons de cow boy qu’il publie en 1910.

Ce travail sur la musique lui permit d’obtenir plusieurs postes et missions importantes, notamment celle en lien avec la bibliothèque des archives de Washington. Le matériel qui lui fut fourni lui permit de voyager, avec sa seconde femme Ruby, et d’enregistrer des chansons pour les archives dans les années 1930.

À partir de 1936, le travail de John Lomax se rapproche de la cause noire, il travaille sur la collecte de récits d’anciens esclaves. L’interview de Billy McCrea s’inscrit dans ce recueil de récits, et est réalisée en 1940 à Jasper, au Texas, ancien État esclavagiste membre de la Confédération. L’interview est centrée plus sur les chansons d’esclaves que sur son histoire personnelle même si elle permet de relever certains éléments de sa vie : nature de son travail, durée, etc.

L'histoire de l'esclavage aux États-Unis avec Billy McCrea - Ruby Terrill Lomax | Domaine public
L’histoire de l’esclavage aux États-Unis avec Billy McCrea – Ruby Terrill Lomax | Domaine public

Comment ces documents présentent les conditions de vie d’anciens esclaves, dans un pays qui connaît de multiples mutations ? 

Quelques liens et sources utiles

Portes, Jacques, et Société d’études pour le développement économique et social (Paris). Les États-Unis d’Amérique de Lincoln à Truman : politique et société, 1860-1952. SEDES, 2013.

Frederick Douglass et Hélène Tronc, La vie de Frederick Douglass, esclave américain, écrite par lui-même, Editions Gallimard, 2006.

Fohlen, Claude. Histoire de l’esclavage aux Etats-Unis. Perrin, 1998.

Pap Ndiaye, Les noirs américains : en marche pour l’égalité, Galimard, 2009

Peter Kolchin, Une institution très particulière : l’esclavage aux Etats-Unis 1619-1877, Belin, 1998

Sacré Robert, Les negro spirituals et les gospel songs, PUF, collection Que sais-je ? 1993.

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