Olympe de Gouges, figure de proue du féminisme des premières heures, a marqué l’histoire par son engagement inébranlable pour l’égalité des sexes et les droits des femmes.
Au XVIIIe siècle, dans un contexte de Révolution française où les idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité étaient célébrés, elle a osé revendiquer ces droits également pour les femmes. Avec la publication de la « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne » en 1791, Olympe de Gouges, au même titre que Charlotte Corday, a défié les normes de son époque en réclamant l’égalité juridique, politique et sociale entre hommes et femmes.
L’histoire d’une femme avant-gardiste
Homme, es-tu capable d’être juste ? C’est une femme qui t’en fait la question ; tu ne lui ôteras pas du moins ce droit. Dis-moi ? qui t’a donné le souverain empire d’opprimer mon sexe ?
Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, Olympe de Gouges (1791).
Tels sont les mots qui figurent dans la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d’Olympe de Gouges. Deux années après cette parution, en 1793, Olympe de Gouges est guillotinée sur ordre de Robespierre. Mais quelle est son histoire ?
Olympe de Gouges fait partie de notre glossaire « 20 femmes inspirantes ». N’hésitez pas à le consulter !
Née en 1748 sous le nom de Marie Gouze, elle est mariée à l’âge de 16 ans à un “officier de bouche” (personne chargée des plats) de trente ans son aîné, qu’elle déclare plus tard n’avoir jamais aimé. Son mari meurt dans les années 1770, lui offrant une nouvelle vie de liberté : le veuvage. Elle s’installe à Paris, avec son fils unique, et prend le pseudonyme Olympe de Gouges.
Femme libre, elle est considérée comme une courtisane entretenue par les hommes et se retrouve injustement dans la “liste des prostituées de Paris” d’un auteur qui n’intéresse personne, Nicolas Edme Restif (selon la romancière Benoîte Groult).
Estimant son éducation comme étant limitée, elle commence à fréquenter les salons littéraires, les intellectuels ainsi que les philosophes. C’est dans les années 1780 qu’elle se lance dans l’écriture, et plus particulièrement la rédaction de pièces de théâtre. Cette époque n’est pas marquée par l’enseignement des jeunes filles. Il faut attendre encore de longues années, avant de voir apparaître la première bachelière en France, Julie-Victoire Daubié.
En 1782, elle écrit sa toute première pièce, Zamore et Mirza, dont le sujet traite des conséquences de l’esclavage dans les colonies. Évidemment violemment critiquée, cette pièce signe le début du militantisme d’Olympe de Gouges, et de son implication dans les combats sociaux. Elle ne cessera ensuite d’adopter des positions anti esclavagistes, contre la guerre et en faveur de réformes sociales.
De femme de lettre à militante politique
C’est à travers ses pièces de théâtre et ses écrits qu’Olympe de Gouges fait passer ses messages politiques. Elle demande par exemple l’instauration du divorce dans sa pièce Nécessité du Divorce. Répétée plusieurs fois, cette demande sera finalement adoptée par l’Assemblée législative du 20 septembre 1792. Elle prend également position pour la libre recherche de paternité et la reconnaissance des enfants nés hors mariages.
En plus de prendre position, Olympe de Gouges théorise ses idées, et les présente sous forme de plaidoyer argumenté. Elle sera l’une des premières femmes à introduire et défendre le système de protection des femmes dans la maternité tel que nous le connaissons aujourd’hui. Et oui, les maternités n’ont pas toujours existé. Les femmes accouchaient dans des hôpitaux ordinaires. C’est en partie à Olympe de Gouges que l’on doit la création de maternités.
Ce qui fait d’Olympe de Gouges une militante politique, et non seulement une femme de lettre, ce sont bien ses oeuvres politiques. Elle est devenue une femme politique à part entière, inventant un nouveau modèle d’engagement politique, à l’instar de Ruth Bader Ginsburg aux Etats-Unis, plus d’un siècle après, ou encore Gisèle Halimi, en France.
Une reconnaissance qui tarde à arriver
Longtemps passée sous silence, Olympe de Gouges commence à être véritablement reconnue après la Seconde Guerre mondiale. Ses écrits commencent à être étudiés à travers le monde, ce qui la classe au rang de “première féministe française”. Le combat pour la reconnaissance de cette première femme puissante reste malgré tout très long. Des historiens, comme Alain Decaux, lui restent hostiles et Jacques Chirac a même refusé sa panthéonisation (conseillé d’ailleurs par Alain Decaux).
Finalement, 223 années après son exécution, le buste de marbre blanc d’Olympe de Gouges a fait son entrée à l’Assemblée nationale. C’est la revanche du féminisme, car c’est la première statue d’un personnage historique féminin à prendre sa place parmi les figures d’hommes.
Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l’univers ; reconnais tes droits. […] L’homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers. Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne. Ô femmes ! Femmes, quand cesserez-vous d’être aveugles ? Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la Révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. Dans les siècles de corruption vous n’avez régné que sur la faiblesse des hommes. Votre empire est détruit ; que vous reste-t-il donc ? La conviction des injustices de l’homme.
Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Brochure adressée à la Reine Marie-Antoinette, 1791.
Quelques liens et sources utiles
Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Brochure adressée à la Reine Marie-Antoinette, 1791.
Benoîte Groult, Ainsi soit Olympe de Gouges, Le Livre de Poche, 2014
Olivier Blanc, Olympe de Gouges : De la déclaration des droits de la femme et de la citoyenne à la guillotine, Tallandier, 2022
