L'ouvrage coup de cœur d'avril : Petit dictionnaire des Sales Boulots par Nicolas Méra

De l’esclavage à la ségrégation aux États-Unis XIXe siècle

Après la guerre de Sécession la question de l'esclavage ne doit plus exister, mais le racisme des États du Sud existe par la ségrégation
La ségrégation aux États-Unis, avec l'exemple d'une salle de billard réservée aux personnes colorées - Marion Post Wolcott | Domaine public
La ségrégation aux États-Unis, avec l’exemple d’une salle de billard réservée aux personnes colorées – Marion Post Wolcott | Domaine public

L’esclavage revêt une importance démesurée aux États-Unis, constituant le fondement de son développement économique, mais il fut également la cause de sa division pendant la Guerre de Sécession. Ainsi, la fin définitive de l’esclavage le 31 janvier 1865 a permis l’adoption du XIIIe amendement.

La fin définitive et immédiate de l’esclavage aux États-Unis est entrée en vigueur le 18 décembre 1865, lorsque le texte a été ratifié. La structure de la société a évolué, mais pas de manière fondamentale. Les anciens esclaves sont devenus des ouvriers payés très peu, et certains ont été contraints de rester sur leurs anciennes plantations.

Enfin, la place des anciens esclaves dans cette nouvelle société n’était pas clairement définie, et nombreux sont ceux qui ne voulaient pas les accepter. Cela a marqué le début d’une nouvelle forme de discrimination : la ségrégation.

Après la guerre de Sécession la question de l’esclavage ne devait plus exister, mais le racisme des États du Sud a continué d’exister.

« Ni esclavage, ni aucune forme de servitude involontaire ne pourront exister aux États-Unis, ni en aucun lieu soumis à leur juridiction »

Treizième amendement de la Constitution des États-Unis.

Voici ce qu’énonce le treizième amendement de la Constitution des États-Unis, qui met un terme à l’esclavage à partir du 18 décembre 1865. Le quatorzième, et le quinzième amendement permettent de reconnaitre aux anciens esclaves un statut de véritables citoyens, et une égalité vis-à-vis de la loi. Ils pourront s’exprimer politiquement avec le droit de vote qui leur est accordé.

Le XIXe siècle est marqué par une vague d’abolition dans l’ensemble des puissances européennes, c’est notamment le cas de la France au cours de l’année 1848.

Massacre de partisans de l'abolition, au marais des Cygnes, Kansas, en mai 1858 - Auteur inconnu,  Missouri Historical Society exhibit in Missouri State Capitol | Domaine public
Massacre de partisans de l’abolition, au marais des Cygnes, Kansas, en mai 1858 – Auteur inconnu, Missouri Historical Society exhibit in Missouri State Capitol | Domaine public

Déchirement du monde social américain

En 1861, le début de la Guerre de Sécession entraine l’Union et la Confédération dans un massacre fratricide.

Les deux modes de vie qui se confrontent ne peuvent plus cohabiter sur le même territoire, le libéralisme économique et l’industrialisation du Nord ne permettent plus et rendent désuet l’esclavage.

Esclavage qui est toujours intensivement utilisé dans les grandes exploitations cotonnières du Sud. Le travail de ces exploitations nécessitant énormément de main-d’œuvre produite en masse par l’esclavagisme.

Victoire des abolitionnistes

Dès la fin de la guerre en 1865, l’Union, victorieuse, met en place constitutionnellement un amendement mettant un terme à l’esclavage. Le Congrès passe en force cet amendement avec le soutien et l’impulsion du néanmoins controversé président Abraham Lincoln. Mais la fin de l’esclavage ne marque pas l’intégration parfaite des anciens esclaves dans la société américaine.

L’esclavage est remplacé par la ségrégation qui commence dans les années 1870, lors de la période de « Reconstruction ».

De l’abolition à la ségrégation

Abraham Lincoln est assassiné le 14 avril 1865 par des sympathisants de la cause confédératrice. Il est remplacé par le vice-président Andrew Johnson.

Le nouveau président est prêt à faire rentrer rapidement les États du Sud, dans l’Union, mais n’est pas pour autant soucieux des droits civiques des anciens esclaves. Dès lors le Congrès, alors, sous domination des Républicains radicaux, met en place une procédure d’impeachment (destitution).

Jusqu’au Compromis de 1877, les États du Sud ne sont pas maîtres de leur fonctionnement, mais ils sont sous la direction du gouvernement fédéral.

L’armée de l’Union se place comme gérante des nouvelles lois et de la politiques mise en place dans le pays et surtout dans les États du Sud, elle occupe physiquement ces territoires.

À partir du Compromis de 1877, et du retour des démocrates dans le monde politique des États du Sud, les premières lois ségrégationnistes commencent à être mises en place.

Afro-américain buvant à une fontaine réservée aux Noirs, vers le milieu du xxe siècle - Russell Lee | Domaine public
Afro-américain buvant à une fontaine réservée aux Noirs, vers le milieu du xxe siècle – Russell Lee | Domaine public

Les lois Jim Crow de 1876 à 1964

Entre 1876 et 1964, les lois Jim Crow ont pour objectifs de distinguer l’appartenance raciale, tout en maintenant les droits civiques nouvellement acquis pour une partie de la population américaine. Ces lois sont dans un premier temps indépendantes du gouvernement fédéral, parce que votées dans les États, mais elles sont confirmées partiellement par la cour suprême en 1883 avec le civil rights cases.

C’est en 1896, que la ségrégation est totalement confirmée avec l’arrêt Plessy v. Ferguson qui la rend légale.

Une ségrégation bien réelle et visible

Cette ségrégation n’est pas anodine et a une réelle visibilité dans la société, au travers des différentes œuvres immortalisées par des panneaux, affiches et scènes de la vie corroborant cet état. Le premier document est une photographie intitulée : « Negro going in colored entrance of movie house on Saturday afternoon, Belzoni, Mississippi Delta, Mississippi » prise par la photographe sociale Marion Post Wolcott en octobre 1939. Marion Post est une militante antifasciste. Elle travaille comme d’autres photographes pour la Farm Security Administration lors de la Grande Dépression (Dorothea Lange).

Le second document reproduit les paroles de la musique Strange Fruit interprétée par Billie Holiday et qui s’inspire du poème composée en 1937 d’Abel Meeropol traitant du racisme et de la violence que subissent les Afro-américains.

Southern trees bear strange fruit
Blood on the leaves
Blood at the root
Black bodies swinging in the southern breeze
Strange fruit hanging from the poplar trees
Pastoral scene of the gallant mouth
The bulging eyes and the twisted mouth
The scent of magnolia sweet and fresh
Then the sudden smell of burning flesh
Here is a fruit for the crows to pluck
for the rain to gather
for the wind to suck
for the sun to rot
for the tree to drop
Here is a strange and bitter crop

Composed by Abel Meeropol, originally sung by Billie Holiday

Abel Meeropol est un Juif d’origine russe membre du Parti communiste américain. Alors qu’il est très touché par des photos de lynchage, il décide d’écrire une musique traitant de ce sujet, Strange Fruit qu’il publie sous le pseudonyme Lewis Allan. Le poème devient populaire, et sera immortalisé par la chanteuse Billie Holiday.

Grande chanteuse de Jazz, Billie Holiday a pour nom de naissance Eleanora Fagan. Elle et sa famille ont été éprouvées par la ségrégation raciale. Sa jeunesse est une suite de misère, d’abandons, de violence et d’abus.

Les deux textes ne sont pas similaires dans leur forme, mais soulèvent une même question, et sont les témoins de cette période difficile pour la cohabitation entre Afro-américains et les blancs aux États-Unis.

Quelques liens et sources utiles

Douzet, Frédérick. « Les évolutions récentes de la ségrégation aux États-Unis ». L’information géographique, vol. 69, no 4, 2005, p. 20‑31.

Collins, Sharon M. « La ségrégation par la fonction, paradoxe de l’ »Affirmative action » ». Hommes et Migrations, traduit par Mona de Pracontal, vol. 1245, no 1, 2003, p. 65‑73

« L’abolition par la Cour Suprême des Etats-Unis de la ségrégation raciale dans l’enseignement public. L’arrêt de 1955 ». Revue internationale de droit comparé, vol. 7, no 4, 1955, p. 783‑87.

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